Il existe un vaste débat parmi les militants du monde entier sur la position à adopter face à la guerre en Ukraine. Dans ce débat, on constate un poids important de la campagne faite par les partis communistes, qui soutiennent pour la plupart l’invasion russe. En plus de ces partis, il existe un certain nombre d’organisations qui ne sont pas staliniennes, mais qui reproduisent les mêmes arguments. Il nous semble qu’il s’agit d’une discussion d’une importance capitale aujourd’hui, qui comporte de nombreux éléments complexes. Pour cette raison, il semble nécessaire de ramener la discussion à ses aspects centraux.
le 6 mars
L’appareil stalinien international et le castro-chavisme restent forts.
L’appareil stalinien mondial est sorti en crise et affaibli de la restauration du capitalisme dans les anciens États ouvriers. Mais les PC continuent à avoir une force importante, et même un poids de masse dans de nombreux pays du monde.
L’importance de l’appareil stalinien aujourd’hui n’est pas seulement due à l’importance des PC. Il y a le castro-chavisme, qui est un mouvement plus large, regroupant des gouvernements, des partis et des mouvements liés au stalinisme, comme les gouvernements cubain, vénézuélien, nicaraguayen et autres. En outre, il y a le poids de l’idéologie de la conciliation de classes qui est largement défendue également par les autres partis réformistes, avec lesquels les PC s’unissent. Les idéologies diffusées par les PC trouvent un écho auprès de nombreuses organisations réformistes et centristes dans le monde.
L’autre facteur est lié au changement dans l’ordre impérialiste. L’appareil stalinien mondial défend l’alliance Chine-Russie comme étant « progressiste ». Comme nous le verrons, ils continuent à être les alliés non plus de dictatures staliniennes dans des États ouvriers, mais de dictatures bourgeoises.
Certains des PC continuent à dire que la Chine est « socialiste », d’autres reconnaissent qu’elle est déjà capitaliste, mais qu’elle est progressiste face à l’impérialisme américain. De nombreux PC reconnaissent que la Russie est capitaliste, mais disent aussi que Poutine est progressiste, face à l’impérialisme.
Avec la théorie stalinienne des « camps progressistes », les staliniens ignorent les classes sociales, pour justifier la répression de dictatures bourgeoises comme celles de la Syrie, du Venezuela et du Nicaragua vues comme « progressistes ». Et ils poursuivent en disant que Cuba est un pays socialiste, en défendant la répression contre la mobilisation populaire du 11 juillet dernier.
L’axe en formation entre la Chine et la Russie et la crise de l’ordre impérialiste mondial
La guerre en Ukraine est une expression de la crise de l’ordre impérialiste mondial et, à son tour, elle approfondit considérablement cette crise.
L’évaluation de cette crise de l’ordre mondial dépasse l’objet de cet article. Nous nous concentrerons sur l’un de ses éléments centraux, à savoir l’alliance en formation entre la Russie et la Chine.
Tant la Chine que la Russie d’aujourd’hui ont leurs origines dans des États ouvriers bureaucratiques, dans lesquels la bureaucratie au pouvoir a elle-même dirigé la restauration du capitalisme. Cependant, ces États ont connu des parcours différents quant à leur situation dans la division du travail du monde capitaliste.
La Chine a été intégrée dans l’économie mondiale comme une sorte d' »usine du monde », avec d’importants investissements impérialistes. Les multinationales ont profité de la dictature du PC pour imposer des salaires de misère aux travailleurs chinois et produire à bas prix. Telle a été la tonalité des années 80 et 90 du siècle dernier. Cependant, la croissance de la nouvelle bourgeoisie chinoise a conduit celle-ci à entamer une bataille pour l’hégémonie sur le marché international avec l’impérialisme américain, avec comme conséquence un repositionnement de son rôle dans la division mondiale du travail.
Indépendamment du débat sur la question de savoir si la Chine est impérialiste ou non, elle est aujourd’hui la deuxième plus grande économie du monde. Telle est la réalité actuelle, qui s’exprime dans la « guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine », ce qui aurait été impensable au cours des années 80 et 90 du siècle dernier.
La Russie, après la restauration, a suivi un chemin opposé, celui d’une énorme destruction des forces productives, perdant une grande partie de son large parc industriel. Elle s’est placée dans une position subordonnée dans l’économie mondiale, essentiellement en tant que producteur de gaz et de pétrole. Il s’agit d’une économie décadente, dépendante du capital financier impérialiste et des exportations de pétrole et de gaz vers l’Europe.
Cependant, la Russie a hérité sa puissance nucléaire de l’ancien État ouvrier, elle l’a maintenue et l’a modernisée. Elle reste la deuxième puissance nucléaire de la planète.
Une alliance est en gestation entre la Chine et la Russie, qui comprend la deuxième économie mondiale et l’économie russe en déclin, mais qui dispose du deuxième arsenal nucléaire mondial. Cela tend à avoir une très grande importance dans la crise de l’ordre impérialiste mondial.
Un mois avant l’invasion de l’Ukraine, Poutine s’est rendu en Chine à l’occasion de l’ouverture des Jeux d’hiver, et a signé une déclaration commune avec Xi Jinping, établissant un « accord sans réserve » de coopération économique, politique et militaire, dans lequel l’OTAN est également mise en cause. La Chine est déjà le principal partenaire commercial de la Russie. Poutine a attendu la fin des Jeux d’hiver, à la demande de la Chine, et deux jours plus tard, il a envahi l’Ukraine.
La Chine sauve les apparences, ne semble pas défendre explicitement la Russie, parce qu’elle a besoin de maintenir ses affaires dans le monde entier et qu’elle « soutient la paix ». Mais elle ne condamne pas l’invasion et, en substance, jusqu’à présent, elle semble soutenir l’action de Poutine.
L’impérialisme nord-américain maintient sans aucun doute son hégémonie économique et militaire. Mais il affiche un déclin économique et éprouve de plus en plus de difficultés à remplir son rôle de gendarme du monde. Il reste hégémonique, mais il a de plus en plus de difficultés à maintenir son contrôle sur le monde, comme l’a démontré récemment la défaite et le retrait d’Afghanistan.
L’ordre impérialiste était déjà remis en question par la vague économique descendante qui a débuté avec les récessions de 2007-09 et de 2020. Cela a conduit à des crises inter-bourgeoises et inter-impérialistes, et a fourni la base matérielle pour les soulèvements de masse qui ont eu lieu.
Mais il est indéniable qu’un conflit entre deux pôles – États-Unis contre Chine-Russie – serait un élément fort de déséquilibre et de crise dans l’ordre mondial.
Et cela nécessite de caractériser ce que signifient ces deux pôles. Le pôle hégémonique impérialiste contre-révolutionnaire n’a pas besoin d’être présenté. C’est l’impérialisme dominant, le plus grand ennemi des travailleurs du monde entier.
Cependant, l’autre pôle, mené par la Chine et la Russie, a également un contenu catégoriquement contre-révolutionnaire.
Auparavant, lorsque ces pays étaient encore des États ouvriers bureaucratisés, ils étaient déjà des pôles contre-révolutionnaires, responsables d’innombrables défaites révolutionnaires et de la « coexistence pacifique » avec l’impérialisme. Mais aujourd’hui, il s’agit d’un rôle qualitativement plus contre-révolutionnaire. Ce sont des États bourgeois où règnent les dictatures.
Ces dictatures bourgeoises n’apportent aucun soutien d’aucune sorte aux processus révolutionnaires qui existent dans le monde. Au contraire, elles soutiennent les dictatures bourgeoises contre-révolutionnaires dans le monde, comme le Myanmar, le Soudan, la Syrie, le Venezuela, le Nicaragua, Cuba et d’autres. Elles ont défendu la répression violente de ces dictatures contre leurs propres peuples.
La Chine et la Russie, en tant qu’États bourgeois, défendent les intérêts économiques de leurs bourgeoisies dirigeantes. Ils n’ont aucun rôle progressiste, et encore moins anti-impérialiste.
Les conflits entre les deux pôles contre-révolutionnaires (États-Unis vs Chine-Russie) prennent et prendront différentes formes, telles que des différends économiques comme la « guerre commerciale » entre les États-Unis et la Chine, des guerres régionales comme l’invasion russe de l’Ukraine, et d’autres encore, de qualités et de dimensions différentes.
Chacun de ces conflits nécessitera une analyse concrète de la réalité concrète, pour définir la position exacte des socialistes révolutionnaires. Mais cette analyse concrète doit partir de cette évaluation marxiste générale de deux pôles contre-révolutionnaires et de leurs conséquences dans la crise de l’ordre impérialiste mondial.
La pression de l’impérialisme sur l’Ukraine
Dans le conflit ukrainien, on retrouve les actions de ces deux pôles contre-révolutionnaires.
L’impérialisme agit directement dans la région. En premier lieu par la soumission du gouvernement de Kiev à l’Union européenne, dans un processus de recolonisation du pays.
L’OTAN, l’alliance militaire impérialiste, a progressé vers les pays d’Europe de l’Est après la restauration du capitalisme dans la région, intégrant la République tchèque, la Slovaquie, la Pologne, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Slovénie, la Croatie, le Monténégro et l’Albanie.
Poutine affirme que le conflit actuel est fondé sur la possibilité d’intégrer l’Ukraine à l’OTAN.
L’oppression de l’Ukraine par la Russie
De l’autre côté, il y a le pôle contre-révolutionnaire russe. Il existe une oppression séculaire de la Russie sur l’Ukraine, depuis l’époque du tsarisme.
Le seul moment où cela a été rompu a été la révolution russe et la formation de l’URSS, à laquelle l’Ukraine a adhéré de son plein gré. C’était une démonstration que seule la révolution socialiste peut vraiment résoudre les problèmes des oppressions nationales. Toutes les nationalités opprimées par la Russie tsariste ont été assurées de la possibilité d’une union libre, qui permettrait d’unir les forces productives dans une plus large mesure que dans un petit pays. Mais avec tous les droits nationaux garantis, y compris le droit de faire sécession de l’URSS quand elles le souhaiteraient. Cet exemple historique est d’une importance capitale. Ce n’est qu’en gagnant la conscience du peuple ukrainien, comme l’ont fait les bolcheviks, qu’il est possible de commencer à surmonter l’oppression nationale.
La contre-révolution stalinienne a mis fin à ce processus, elle a écrasé à nouveau toutes les nationalités et généré un immense rejet de l’oppression russe dans la conscience du peuple ukrainien.
Cela a fait de l’URSS une brutale prison des peuples. Lorsque les révolutions qui ont renversé les dictatures staliniennes ont eu lieu, il en a été de même pour l’URSS, ce qui a été extrêmement progressiste.
Cependant, en raison de la crise de la direction révolutionnaire, ce sont des secteurs de la bureaucratie elle-même qui ont dirigé ces révolutions. Ces directions ont fait avancer le processus de restauration capitaliste qui avait déjà commencé.
En Russie, ce processus a porté au pouvoir Eltsine, puis Poutine. Poutine, ancien chef du KGB, est l’expression de la nouvelle bourgeoisie russe qui s’est emparée des grandes entreprises qui appartenaient autrefois à l’État.
En Ukraine, la chute de la dictature stalinienne a également été capitalisée par un secteur de la bureaucratie avec à sa tête Leonid Kravtchouk, commandant de la restauration capitaliste.
Après une série de gouvernements et de crises politiques majeures, en 2014 une révolution démocratique a renversé le gouvernement de Viktor Ianoukovitch.
Ce gouvernement était un agent de la recolonisation européenne, mais il était directement lié à Poutine. Les masses, brutalement attaquées par les plans économiques du gouvernement, ont renversé Ianoukovitch.
La réalité concrète de l’invasion russe
Il y a donc deux pôles contre-révolutionnaires à l’œuvre dans la guerre en Ukraine. Mais quelle est la réalité concrète, et comment ces pôles fonctionnent-ils ?
Il ne s’agit pas d’une invasion militaire de l’OTAN contre le territoire russe. Si tel était le cas, nous prendrions, sans aucun doute, la défense de la Russie, à la fois parce que c’est une économie dépendante de l’impérialisme, et parce qu’elle aurait été envahie.
Ce qui existe en réalité est une invasion militaire de la Russie contre l’Ukraine, pour rétablir son oppression directe. Telle est la réalité concrète aujourd’hui. Une invasion brutale par la deuxième puissance militaire du monde, contre un pays qui n’est pas en état militaire d’affronter la Russie, et qui compte sur l’héroïsme de son peuple.
Poutine, dans un discours télévisé à la veille de l’invasion, a déclaré :
« L’Ukraine moderne a été créée entièrement par la Russie, plus précisément par les bolcheviks, la Russie communiste. Ce processus a commencé immédiatement après la révolution de 1917, et, de plus, Lénine et ses associés l’ont fait de la manière la plus désordonnée par rapport à la Russie : en divisant, en arrachant à la Russie des morceaux de son propre territoire historique. »
En d’autres termes, Poutine réalise cette invasion en attaquant directement l’héritage bolchevique qui a historiquement engendré l’URSS. Ce n’est pas par hasard s’il remet explicitement en question Lénine. Poutine remet directement en question le droit de l’Ukraine à exister en tant que nation, affirmant que le pays appartient à la Russie.
C’est d’une importance capitale. L’appareil stalinien a toujours cherché à camoufler ses positions par des citations déformées de Lénine. Il doit maintenant défendre cette action de Poutine, qui a été réalisée en rompant explicitement avec l’héritage de Lénine.
La méthodologie stalinienne en action
Une partie de l’appareil stalinien mondial et du castro-chavisme soutient directement l’invasion russe. Une autre partie évite de se heurter au rejet de l’invasion par les masses, disant qu’elle est contre la guerre mais que « c’est la faute de l’OTAN », et elle refuse de soutenir la lutte ukrainienne.
Il y a aussi les crises. Les PC grec et turc, par exemple, ont été contre l’invasion.
Mais la plupart des PC du monde justifient et soutiennent Poutine ou l’excusent d’une manière ou d’une autre. Le PC russe (qui a une représentation au parlement), le PC chinois, le PC cubain, ainsi que le PC do B et le PC au Brésil, et bien d’autres, ont cette position.
Pour cela, ces partis ignorent la réalité concrète, justifiant l’invasion par la « menace de l’OTAN », pour « défendre la Russie progressiste contre l’impérialisme ».
Pour justifier cette idéologie, l’appareil stalinien répète la méthodologie habituelle, avec son traditionnel déterminisme mécanique combiné à de simples falsifications.
Le déterminisme mécanique, très typique de l’idéologie stalinienne, s’exprime dans la logique formelle suivante : nous devons toujours être en défense du pôle « progressiste » contre l’impérialisme, et donc nous soutenons la Russie.
On ignore ainsi l’obligation du matérialisme dialectique d’allier la théorie à l’étude de la réalité concrète. Tout d’abord, on ignore la théorie marxiste, en remplaçant sa base qui est la lutte des classes par celle des « camps progressistes ». L’appareil stalinien considère la Russie comme progressiste, laissant de côté le caractère de classe de la nouvelle bourgeoisie russe, et ignorant qu’elle fait partie d’un pôle mondial contre-révolutionnaire. Et elle ignore la réalité concrète : l’invasion russe de l’Ukraine.
Outre cette méthodologie, le stalinisme utilise également ses falsifications traditionnelles. Les plus évidentes sont celles de la dissimulation de l’invasion militaire de la Russie en tant qu' »action anti-impérialiste », et celle de la « lutte contre le nazisme en Ukraine ». Examinons ces falsifications une par une.
Poutine est-il anti-impérialiste ?
Le principal « argument » du stalinisme et de ses partisans est que l’action de Poutine serait une défense contre l’impérialisme. Il s’agirait donc d’une action anti-impérialiste.
Le premier défi à cette idéologie est le critère de la vérité. Ce qui existe en réalité, c’est l’invasion militaire brutale de l’Ukraine par la Russie. Les villes encerclées, détruites sont ukrainiennes, les morts civils sont ukrainiens.
La deuxième réfutation est constituée par les antécédents de Poutine. Dans la continuité d’Eltsine, il a été l’agent de la pénétration de l’impérialisme en Russie, de la destruction de l’industrie russe et de la recolonisation du pays par les multinationales. Autrement dit, il a toujours été un allié de l’impérialisme. Un allié qui a des frictions avec l’impérialisme, mais un allié.
En outre, sur la scène internationale, quand Poutine a-t-il aidé un processus révolutionnaire anti-impérialiste ? Jamais.
Il est, jusqu’à présent, l’un des soutiens militaires du génocide contre le peuple syrien perpétré par Bachar el Assad.
Poutine agit pour maintenir l’oppression sur les anciennes républiques soviétiques, du Bélarus en soutenant la dictature de Loukachenko, et en aidant avec des troupes à noyer dans le sang la rébellion au Kazakhstan.
Troisièmement, il faut répondre à la question suivante : l’invasion de l’Ukraine n’est-elle pas une manœuvre militaire défensive visant à empêcher la pénétration de l’OTAN dans ce pays ? Non, ce n’est pas le cas.
Comme chacun le sait, la lutte militaire est une extension de la lutte politique. La première façon de lutter contre l’OTAN en Ukraine est de gagner le peuple ukrainien contre l’OTAN. Et cela exige une politique de respect de la nationalité ukrainienne et une politique anti-impérialiste. Poutine n’a ni l’une ni l’autre. Il ne gagne pas la confiance des Ukrainiens en leur montrant qu’il les respectera, et ne cherche pas non plus à les diriger contre l’impérialisme européen. Et maintenant, avec l’invasion, il a définitivement gagné la haine des Ukrainiens, ouvrant un champ politique à l’OTAN. Il peut gagner la bataille militaire, mais il perd la bataille politique pour la conscience des Ukrainiens.
Ce n’est pas par hasard que Poutine a annoncé l’invasion en mettant ouvertement en cause Lénine et la politique des bolcheviks, qui consistait à gagner la conscience des Ukrainiens pour continuer à vaincre l’oppression nationale. Qui gagne politiquement ? C’est l’OTAN, qui restera dans la conscience du peuple ukrainien comme une alternative à l’oppression russe.
Quatrièmement, il est déjà possible de mesurer le résultat politique international de l’invasion de l’Ukraine. Indépendamment du résultat concret de l’invasion, les gouvernements impérialistes du monde sont devenus politiquement plus forts auprès des masses, apparaissant comme les « défenseurs de la paix ». Biden, qui était de plus en plus remis en question aux États-Unis, est redevenu plus fort. Les gouvernements impérialistes européens ont également gagné du soutien parmi les masses. L’Allemagne, dont le réarmement était strictement limité depuis la seconde guerre mondiale, a décidé de tripler son budget militaire en comptant sur le soutien des masses.
Sur le plan économique, la Russie souffre de sanctions commerciales, financières et diplomatiques qui l’affaiblissent considérablement sur le plan international.
La vérité, que les staliniens veulent cacher, est que Poutine n’a pas envahi l’Ukraine pour se défendre de l’OTAN. Il l’a envahie pour renouer avec l’oppression russe sur ce pays, perdue avec la révolution de Maïdan. Et le résultat politique de cette action de Poutine est le renforcement politique de l’impérialisme et de l’OTAN.
Si la Russie gagne la guerre en Ukraine, ce ne sera pas une victoire de la révolution. Cela ne renforcera pas le mouvement de masse, mais l’un des pôles de la contre-révolution dans le monde.
Mais même s’il remporte une victoire militaire, Poutine s’affaiblit politiquement. Il a donné à l’impérialisme des armes pour affaiblir la Russie politiquement et militairement. Il devra financer une occupation militaire, avec des coûts économiques, politiques et militaires énormes. Tout cela était prévisible, et dément catégoriquement la farce du stalinisme, celle d’une action « anti-impérialiste ».
Poutine est-il un démocrate contre le fascisme ?
L’autre grande farce de Poutine et de l’appareil stalinien est qu’il s’agirait d’une guerre « contre le fascisme ». L’Ukraine aurait un gouvernement fasciste, et il faudrait le vaincre. Ainsi, Poutine serait l’agent d’une lutte démocratique contre le fascisme.
Il est vrai qu’il existe des groupes fascistes en Ukraine. Le bataillon Azov, par exemple, est une organisation clairement fasciste. De même, il existe en Russie des groupes fascistes qui soutiennent Poutine. Dans la région de Donetsk et de Louhansk, des groupes paramilitaires fascistes soutiennent l’invasion russe. Il y a des groupes fascistes des deux côtés.
Poutine a eu le soutien d’une bonne partie de l’ultra-droite mondiale dès le début de l’invasion. Trump et son stratège Steve Bannon, Orban en Hongrie, Le Pen en France et Bolsonaro ont soutenu Poutine, jusqu’à ce que la vague écrasante de soutien à l’Ukraine les oblige à changer de position.
La victoire de la révolution de Maïdan a permis d’obtenir plus de libertés démocratiques dans ce pays que celles qui existent dans la Russie de Poutine. Nous n’avons aucun accord avec le gouvernement Zelensky, ni avec l’État ukrainien. C’est un État bourgeois, et une démocratie avec de nombreux éléments autoritaires. Mais c’est un fait indéniable qu’il y a des élections régulières en Ukraine, ce qui n’est pas le cas en Russie.
Poutine dirige la Russie de manière dictatoriale depuis 23 ans et a modifié la constitution afin de pouvoir rester au gouvernement jusqu’en 2036. Il ne permet pas l’existence d’une quelconque opposition. Un leader de l’opposition, Alexeï Navalny, a été empoisonné, il a réussi à se sauver, mais il est maintenant en prison. Plus de sept mille personnes ont été arrêtées pour avoir protesté contre la guerre. Poutine contribue à soutenir la répression violente des dictatures au Bélarus et au Kazakhstan.
Seule la farce stalinienne peut soutenir la fable selon laquelle Poutine serait un défenseur de la démocratie.
De quel côté faut-il être dans la guerre ?
Nous avons vu où se trouvent les deux pôles contre-révolutionnaires. Comment alors se situer dans la guerre ukrainienne ? Dans les tranchées du peuple ukrainien, dans la lutte contre l’invasion russe.
En préconisant un soutien total en armes et en nourriture à la résistance ukrainienne. Sans aucune confiance dans le gouvernement Zelensky, un gouvernement bourgeois pro-impérialiste. Sans accepter une quelconque action de l’OTAN dans cette guerre. Nous ne voulons pas échanger l’oppression russe contre une autre, celle de l’UE et de l’OTAN.
Une victoire de la résistance ukrainienne affaiblirait l’un des pôles de la contre-révolution mondiale, en l’occurrence les envahisseurs.
Plus que ça, ce serait la victoire d’un peuple qui a pris les armes. Cet exemple aurait une signification profonde pour la conscience des masses du monde entier, à savoir qu’il est possible, avec la lutte armée d’un peuple, de vaincre une armée puissante.
Pour nous, l’Ukraine n’aura pas d’avenir sans une révolution socialiste. En outre, il sera nécessaire d’étendre la révolution socialiste à d’autres pays, afin d’avancer vers une nouvelle fédération socialiste libre des pays européens, alternative à l’Union européenne impérialiste. La victoire d’un peuple les armes à la main serait un bon début.