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Ligue Communiste des Travailleurs

Section belge de la Ligue Internationale des Travailleurs -
Quatrième Internationale (LIT-QI)

« L'émancipation des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs eux-mêmes. » K. Marx

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29 juin 2014 - pdf

Une machine de guerre contre les travailleurs et les peuples

L’étroite marge de manœuvre du capital financier en Europe, face à la compétition mondiale des grands monopoles, ne peut être agrandie ou maintenue que si la limite imposée par les salaires et les conquêtes sociales du prolétariat se rétrécit. Une nouvelle période de croissance économique, soutenue par de nouveaux investissements, n’est possible que si l’impérialisme parvient à imposer au prolétariat européen des conditions d’existence très inférieures à la norme établie depuis la Seconde Guerre mondiale. La décadence économique du continent impose de plus en plus de sacrifices au prolétariat : c'est la condition pour qu’une poignée d’Etats impérialistes européens, associés à l’impérialisme étasunien, puissent continuer  le pillage de leur propre périphérie européenne et du monde.

1. L’UE : crise capitaliste, ajustement structurel et hiérarchie entre Etats

L’ajustement structurel imposé par l’impérialisme européen touche le prolétariat de tout le continent, mais son poids a un effet différent selon la localisation de chaque pays dans la chaîne impérialiste. Les contre-réformes commencées dans les années 1990 en Allemagne atteignent leur apogée sous le gouvernement social-démocrate et des Verts de Schröder, avec la coupe et l’unification des prestations sociales, l’augmentation de l’âge de la pension (67 ans), l’élimination du salaire minimum, la création de contrats poubelle de 400 euros mensuels, les minijobs, pour 7,5 millions de travailleurs. Le résultat est qu'un travailleur sur quatre gagne moins de cinq euros l’heure, et que les salaires réels de l’ensemble du prolétariat ont chuté de 7 % entre 2000 et 2010. L’amplification de la précarité a donné lieu à des différences salariales abyssales, de près de 40 %. Bien que la vieille aristocratie ouvrière maintienne l’essentiel de ses conquêtes, une part toujours plus importante du prolétariat n’a pas accès aux mêmes conditions de vie que ce secteur plus privilégié. Le capital financier français ou belge, mis au second plan face à son chef de file allemand, maintient son modèle avec l’objectif d’augmenter qualitativement le secteur des travailleurs précarisés et d’augmenter l’exploitation de l’ensemble du prolétariat.
   L’ajustement structurel est en train de produire un changement qualitatif dans les relations, entre les classes sociales à l’intérieur de chaque pays, et entre les pays européens, ce qui se manifeste avec une virulence particulière dans la périphérie. L’Union européenne (UE) est un repère de bandits, avec une hiérarchie stricte autour des impérialismes centraux et sous commandement indiscutable de l'Allemagne. Autour d'eux s'accouplent les impérialismes de troisième file, comme l’Italie et l’Espagne, incapables de jouer un rôle indépendant sur le marché mondial. L'oligarchie financière de ces derniers pays, qui agit comme parasite des grands requins (l'Allemagne, la France et l'Angleterre), se cramponne à l'UE. La raison est que ce n'est qu'en faisant partie de l'UE qu'elle peut continuer à profiter de ses entreprises monopolistiques dans chaque pays et à agir, comme partenaire mineure du club impérialiste, dans des régions comme l'Amérique latine. Et pour cela, elle est disposée à imposer les pires sacrifices aux prolétariats des pays respectifs.
   La surexploitation des pays de l’Europe de l'Est, incorporés d'emblée à l’UE comme semi-colonies, avec des salaires de 350 euros par mois et la retraite à 75 ans, est la référence pour affronter la compétitivité internationale exigée de la périphérie par le capital financier. La recette du FMI et de l’UE dictée en Lituanie et en Bulgarie entraîne une tragédie sociale. Après avoir réduit de 30 % le salaire nominal des travailleurs lituaniens, rabaissé leur salaire minimum et réduit sauvagement les pensions, 10 % de la population a émigré pour fuir la faim. En Bulgarie, ce sont 15 % des travailleurs qui ont quitté le pays. Les semi-colonies de l’Europe de l'Est, érigées en modèles d’ajustement, ont été incorporées à l'UE comme une réserve de main-d'œuvre bon marché dans la gamme de valeurs des multinationales, au prix d’un recul de plus d’un demi-siècle dans leurs conditions de vie. A la frontière orientale de l’UE, la Russie se transforme en fournisseur de matières premières, en particulier de gaz. Sa décadence et le processus de semi-colonisation économique tendent à s’accélérer avec la fin du boom des matières premières.
   Quant à la Grèce et au Portugal, l’intervention directe de la Troïka a donné lieu à un changement dans leur structure sociale et celle de l’Etat, qui répond déjà directement au diktat extérieur. Les morts dans les files des hôpitaux, le retour de maladies, typiques de la pauvreté, qui n’existaient plus depuis 50 ans, ainsi que la malnutrition, la destruction de l’éducation et de la santé publiques et la baisse des salaires, produisent un changement profond dans les conditions d’existence de ces pays. C'est l’apogée d’un large processus historique de décadence. L’UE et l’euro ont créé l’illusion de la possibilité de revenir à leur passé impérialiste et colonial. Mais l’endettement massif, qui semblait être le passeport d’entrée dans le club des grands, devient l’instrument de soumission.
   Depuis l’éclatement de la crise de la dette, le statut national de ces pays se dégrade : de leur condition de partenaire mineur de l’impérialisme, ils passent à un statut de pays semi-colonial. La soumission de la bourgeoisie parasitaire de ces pays aux Mémorandums de la Troïka est l’expression de la restructuration complète de l’appareil de l’Etat, et du niveau d’exploitation du prolétariat, selon les nouvelles conditions dictées par l’impérialisme. Ces pays sont situés dans des secteurs marginaux de l’accumulation capitaliste et à la queue de la division internationale du travail en Europe. Leur décadence s’approfondit avec l’incorporation dans l'UE des semi-colonies de l’Est, dont la proximité au centre industriel et la spécialisation de sa main d’œuvre attirent les investissements impérialistes (particulièrement de l’industrie automobile), alors que les biens de consommation avec haute teneur en force de travail (textiles, chaussures, etc.) sont importés de la Chine et de l’Asie de l’Est.
   Les bourgeoisies grecque et portugaise, éloignées du circuit de la production concentrée des monopoles impérialistes, et confrontées à l’impossibilité de s’incorporer de manière indépendante au marché mondial, livrent leurs pays au capital financier impérialiste avec des privatisations à des prix de bradage ; et elles ajustent les conditions de travail et sociales du pays à celles des semi-colonies de l’Est.
   L’Europe impérialiste, dépassée par les Etats-Unis depuis les années 1920 et divisée entre ses différents Etats, a arrêté d’être le centre de gravité de l’économie et de la politique mondiales. Les conditions historiques particulières qui permirent le boom du capitalisme européen après la Seconde Guerre mondiale et son second souffle avec l’amplification du Marché Commun jusqu’à l’actuelle Union européenne, furent le résultat d’un processus essentiellement politique, dans lequel la collaboration complice de la social-démocratie et des principaux partis staliniens fut décisive. C'est ainsi que le capital est parvenu à surmonter la fragmentation des forces productives dans 50 Etats, et à établir une échelle de hiérarchie concentrée autour des pays impérialistes centraux, avec l'Allemagne comme pivot. L’intégration productive sous le capital financier est toutefois l’opposé d'une véritable unité de l’Europe, puisque cette intégration se base sur une division du travail claire, qui approfondit à l'extrême les différences et l’antagonisme entre les pays.
   L’UE reflète le haut niveau d’unification économique européenne, le caractère continental de ses forces productives, et donc l’impérieuse nécessité historique de l’élimination des Etats nationaux. Mais l’UE est, en même temps, la négation de tout cela, étant le fruit de l’accord de certaines bourgeoisies impérialistes qui ne peuvent ni ne veulent se passer de leur propre Etat. Celui-ci reste toujours pour eux l'instrument vital de domination, l’élément clef pour la défense des intérêts de « leur » capital financier, et la meilleure façon de compartimenter la lutte de classes dans des cadres « nationaux ». Le mouvement pour l’unification capitaliste de l’Europe est celui de la lutte entre ses principales puissances impérialistes pour imposer chacune son hégémonie dans le continent, et en même temps le moyen commun entre tous pour mettre en échec le prolétariat.
   Le haut degré d’intégration économique atteint par le capital n’a pas promu la conformation d’une structure étatique européenne qui aurait comme objectif d'obtenir la convergence entre les pays, bien au contraire. Car si bien les frontières formelles ont été en partie diluées, les frontières économiques et sociales entre les économies dominantes et les dominées se sont fortement renforcées par la division du travail et par les bénéfices qu’en retire le capital financier. Cette tendance, loin de s’atténuer, s’approfondit avec la semi-colonisation de la Grèce et du Portugal, l’incorporation de nouveaux pays semi-coloniaux, comme actuellement la Croatie, ainsi que par la politique impérialiste envers les anciennes républiques de l'URSS, appelée « Association orientale ». L'UE est aussi un bélier pour l'imposition, par les anciens empires coloniaux européens, de traités néo-coloniaux dans leurs anciennes colonies, surtout en Afrique, en approfondissant le pillage des richesses.

Décadence économique et domination impérialiste

La décadence relative de l’Europe face à l’hégémonie étasunienne fut compensée par l’amplification du Marché commun primitif, avec l’incorporation de nouveaux pays (l'Angleterre, le Danemark et l'Irlande dans les années 1970 ; la Grèce, l'Espagne, le Portugal dans les années 1980 ; et les pays de l’Europe centrale et de l’Est en 2004). L’incorporation a eu lieu, tout d’abord, au prix du renforcement de la prépondérance de l’industrie allemande, dont les exportations vers la périphérie se multiplièrent parallèlement à la désindustrialisation de cette dernière. La liberté de mouvement des capitaux a généré un système productif intégré qui reproduit méticuleusement au sein de l'Europe les caractéristiques du marché mondial capitaliste : juxtaposition de pays inégaux, spécialisation productive régressive de la périphérie comme fournisseuse de biens de basse technologie et de main-d'œuvre bon marché en faveur d’un centre industriel concentré autour de l’Allemagne (y compris les Pays-Bas, l’Autriche et les pays du Nord), la France et l’Angleterre.
   A partir de là, il n’y a déjà plus la possibilité pour les pays incorporés de retrouver de manière isolée une position sur le marché mondial. Cette intégration productive organisée par le capital financier se nourrit de l’inégalité et l'alimente à la fois : le salaire moyen dans les multinationales de l’automobile dans les pays de l’Est équivaut à 17 % du salaire correspondant en Allemagne. Chaque pays occupe une place dans cette échelle hiérarchique, qui a à sa tête le capital financier allemand associé à l'étasunien.
   D'autre part, l’ajustement structurel européen en cours, accéléré par la crise initiée en 2007, ne peut être compris en dehors de la nouvelle division mondiale du travail, produit de la restauration du capitalisme en Chine, dans l'URSS et dans les pays de l'Est, et de l’offensive re-colonisatrice de l'impérialisme dans les années 1990. Les conditions générales de l’économie mondiale et de la concurrence entre monopoles furent modifiées profondément par la surexploitation et l’industrialisation accélérée de la Chine (et de l’Asie de l’Est) à partir d'importants investissements impérialistes (avec les entreprises étasuniennes à l'avant-garde) qui l'ont transformée en « usine du monde » et en plate-forme d'exportation pour les Etats-Unis et l'Europe.
   L'échelle de production mise en œuvre par l’Allemagne exige une autre norme d’exploitation du prolétariat sur tout le continent, afin de maintenir le leadership de ce pays, sur le marché mondial des biens industriels de haute technologie qu'il exporte vers l’Asie de l’Est et les Etats-Unis. Et plus bas un pays se trouve sur l’échelle d’approvisionnement, plus profonde est l’attaque à la classe travailleuse et au statut de ce pays, dont la place dans la hiérarchie des Etats est modifiée.
   La spirale récessive initiée avec la crise économique en 2007, et qui a entraîné tous les pays de l’UE, fut stoppée par le pillage de la périphérie – ce qui a évité la faillite des grandes banques européennes – et par l'attaque profonde au prolétariat sur tout le continent. Ce fut le transfert brutal de survaleur vers le système financier de l’Allemagne, la France et l'Angleterre qui a évité l’explosion de l’euro. Le pillage a eu lieu moyennant l’expropriation du budget public des Etats débiteurs, placés sous l’intervention préalable de la Troïka. Mais cette expropriation s'est avérée insuffisante pour assainir le système bancaire, encore enseveli sous une montagne de dettes. L’endettement privé, surtout des entreprises, continue de paralyser le système de crédit.[1] La dépendance des exportations et le retard dans l'abaissement de l’endettement présagent une longue période de stagnation économique, et on ne peut pas exclure que de nouvelles confrontations éclatent, provoquées par la profonde inégalité dans le développement de la crise entre les pays.

L’UE et l’hégémonie de l’impérialisme étasunien

Le processus d’intégration économique et la toile d'araignée institutionnelle concomitante ont été le terrain où s'est livrée la bataille entre les impérialismes européens pour l’hégémonie sur le continent. L’introduction de l’euro a mis fin, finalement, à la contradiction entre la suprématie absolue de l’industrie allemande et la prédominance politique européenne de la France, donnant l'hégémonie économique, politique et institutionnelle à l'Allemagne réunifiée qui est devenue le grand partenaire européen des Etats-Unis. Cette bataille pour l'hégémonie européenne s'est déroulée sous la domination mondiale de l‘impérialisme étasunien, qui dispose d'une hégémonie acquise dans la Seconde Guerre mondiale et jamais remise en question depuis lors. Autrefois, celui qui dominait en Europe dominait dans le monde. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la rivalité entre les puissances européennes ne vise plus à obtenir la suprématie mondiale, mais la condition de partenaire préférentiel des Etats-Unis.
   L’hégémonie des Etats-Unis est basée sur la prédominance de son capital financier et son énorme suprématie militaire, matérialisée dans l’OTAN, le grand instrument militaire impérialiste centralisé par ce pays. La promotion de l’intégration économique européenne de la part des Etats-Unis a son origine dans le plan Marshall de la seconde après-guerre et correspond aux intérêts de ce pays en tant qu’impérialisme hégémonique : 56 % des investissements étrangers des Etats-Unis entre 2000 et 2010 furent dirigés vers l’UE, où ses multinationales emploient 4 millions de travailleurs. Les Etats-Unis sont la deuxième destination, tant des exportations que du stock de capitaux à l’extérieur, de l’Allemagne. Cela transforme les Etats-Unis en l’un des principaux promoteurs de l’ajustement structurel en cours en Europe. Dans ces circonstances, l’hégémonie allemande ne peut être conçue qu’en association avec l’impérialisme étasunien.
   Les négociations pour l’Accord de libre-échange et d’investissements entre les Etats-Unis et l’UE (Transatlantic Trade and Investment Partnership – TTIP), si elles se concrétisent, redéfiniront les conditions de concurrence entre les grandes corporations multinationales ; et elles auront d’importantes répercussions sur la structure du marché mondial, les liens entre les Etats-Unis et l'Europe, et les relations avec la Chine, l'Asie de l’Est et l'Amérique latine. En ce qui concerne l’Europe, le commerce interentreprises (aujourd’hui un tiers du commerce entre les Etats-Unis et l'Europe) augmentera, et donc la tendance à la réorganisation de l'échelle de valeurs des multinationales étasuniennes en Europe, et vice-versa. Le processus de centralisation des capitaux dans les puissances les plus industrialisées tendra à se répéter à une échelle supérieure, conduisant à de nouveaux ajustements dans le rôle des pays de l'UE, afin que les grandes multinationales européennes puissent entrer en compétition dans des conditions similaires à celles des étasuniennes dans l'ALENA (Accord de libre-échange nord-américain, entre les Etats-Unis et le Canada, où entre le Mexique avec ses maquilas).
   L’actuelle UE ferme un cycle dans lequel le capital financier allemand, sous l’hégémonie étasunienne, est devenu l’axe de l’intégration économique européenne et de ses institutions clefs. On ne peut pas comprendre la polarisation entre les classes et leurs différentes fractions dans chaque pays, ni les processus de semi-colonisation dans la périphérie, la crise des régimes politiques, la croissance de l’extrême droite, l’apparition d'organisations fascistes en Grèce et dans l'Est, la crise des bureaucraties syndicales et de la social-démocratie, la réorganisation du mouvement ouvrier ou la montée électorale du réformisme, si ce n'est comme la résultante de ce processus continental et de sa déclinaison dans chacun des pays.

 

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2. Les partis « néo-réformistes » et leur politique de « refondation » de l'UE

Dans les pays soumis à l’intervention, directe ou sournoise, de la Troïka, le rejet de l’UE est de plus en plus important. Toutefois, les partis qui se préparent à occuper l’espace laissé libre par la social-démocratie et se sont groupés autour du Parti de la gauche européenne (PGE – où l'on retrouve le Front de Gauche français, Die Linke allemande, la Izquierda Unida espagnole, le Bloco de Esquerda portugais et la Syriza grecque) se proposent d’occuper le rôle de dernier rempart de défense de l’UE : « La crise de légitimité de la politique met en danger le processus d’intégration européenne. La confiance dans les institutions européennes n’a jamais été aussi basse. [...] La condition pour que l’UE soit plus acceptée par ses citoyens est qu’il y ait plus d’opportunités pour participer. La Gauche européenne défend la démocratisation de l’Union européenne et de sa structure institutionnelle. »[2]
   Mais alors que ces partis affirment que le projet de la bourgeoisie européenne est menacé par le manque de démocratie dans l’UE, la vie montre exactement le contraire : c’est bel et bien l'avancement de l’intégration européenne, en faveur du capital financier, qui fait que la gestion de l'UE s’exerce inexorablement de manière antidémocratique, bonapartiste. Le rôle de l'UE est de blinder les frontières socio-économiques entre ses Etats membres et de sauvegarder l’actuelle division du travail sur le continent, en approfondissant les inégalités entre les pays et en enfermant la lutte du prolétariat à l’intérieur de ces frontières. Le PGE ne cherche pas à rompre cet engrenage impérialiste qui empêche l’unité du prolétariat européen, mais bien à le rendre acceptable, avertissant le grand capital que son projet est menacé s'il ne le démocratise pas.
   La limite des programmes nationaux des partis du PGE, qu’ils soient localisés dans les pays impérialistes centraux ou dans la périphérie, est définie par l’acceptation des bases et des règles de jeu du projet impérialiste d’unité européenne, représenté par l'UE. De ce fait, face au problème de la dette publique – principal instrument du capital financier pour soumettre la périphérie et pour parvenir à l’ajustement structurel –, ils renoncent à l'exigence du non-paiement et se limitent à proposer sa « restructuration ». La défense, dans les pays créditeurs (l'Allemagne, la France ou l'Angleterre), de la restructuration de la dette de la périphérie, c’est-à-dire de la continuité de son payement, équivaut à la défense de la continuité du pillage, c’est-à-dire des intérêts des bourgeoisies impérialistes de ces pays. Il en va de même pour l’appui du Front de Gauche à la guerre coloniale de l’impérialisme français au Mali.

Le mot d'ordre de Rupture avec l’UE, dans les pays dominés

Dans la périphérie, la résolution politique du congrès de Syriza affirme que la politique d’austérité et la récession détruisent les liens entre les pays européens et renforcent l’euroscepticisme et l’antieuropéisme. Mais jamais dans l’histoire du capitalisme en Europe les liens entre les pays n’ont été si profonds. La politique d’austérité et de récession – c'est-à-dire le pillage de la Grèce – n'est rien d’autre que la continuité de l’extrême subordination avec laquelle ce pays s’est incorporé à la Communauté économique européenne. La profondeur de l’inégalité est la forme avec laquelle le capital financier construit ces liens, à l’époque impérialiste.
   La résolution de Syriza se transforme en une tragédie politique lorsque, parlant d’un pays spolié et pillé, elle ne reconnaît pas le côté impérialiste de l’UE et assume la défense de celle-ci au nom de l’idéologie impérialiste réactionnaire de l’« européisme », entendu comme synonyme de l’intégration des peuples de l’Europe. « Chaque fois que les politiciens bourgeois ont brandi la bannière de l'européisme, de la fédération des Etats européens, […] ce fut toujours un avortement impérialiste. […] Tout comme nous combattons le pangermanisme et le panslavisme, comme des idées réactionnaires, nous n’avons absolument rien en commun avec l'idée du paneuropéisme. »[3] Conformément à cette prédiction avérée de Rosa Luxembourg, en total contraste avec Syriza, l’UE n’est rien d’autre qu’un avortement impérialiste que Syriza refuse de reconnaître et avec lequel elle n’est pas disposée à rompre.
   Alors que la Grèce est un pays pillé, étranglé par une énorme dette impossible à rembourser, un pays semi-colonisé, Syriza renonce au non-paiement de la dette au nom de la « restructuration » de celle-ci, ce qui revient à condamner le pays au pillage sans fin. Son refus de rompre avec l'UE et l'euro – auxquels elle s'accroche désespérément – condamne le pays à la servitude nationale et à un retard structurel, et la classe ouvrière à la pauvreté sans solution.
   Etant donné que l’UE est le canal par lequel l’ajustement structurel est imposé par le capital financier, le PGE a trouvé une formule pour envelopper son « européisme » : la stratégie de la « refondation » de l’UE. Alors que le prolétariat et la jeunesse commencent à tirer leurs conclusions sur le rôle de l’UE, initiant un mouvement de rejet et de rupture, ces organisations s’érigent en dernier rempart de défense de l’UE. Ce programme de « refondation » est très clairement exprimé par Izquierda Unida en Espagne : « L’objectif est de construire une Europe socialement et écologiquement soutenable, qui en termine avec l’actuel Traité de stabilité, avec le principe de la dérégulation du marché, avec la monnaie unique sans Trésor public européen, avec la Banque centrale en tant qu’entité non contrôlée démocratiquement et sans possibilité de se transformer en une vraie Réserve fédérale européenne. ». Bref, il s’agirait de transformer l’UE en un vrai Etat supranational. Pour les partis du PGE, l’UE est un fait très progressiste et toute politique qui vise à sa destruction ou à la rupture avec elle est réactionnaire et nationaliste (« antieuropéiste »). La stratégie de la « refondation de l'UE » signifie l'acceptation des règles de celle-ci, ses institutions et ses limites, ce qui signifie l'élimination du programme de toute revendication anti-capitaliste qui remet vraiment en question l'ajustement structurel et la domination du capital financier.
   Pour eux, l’intégration économique a donné lieu à un embryon de nouvelle superstructure étatique européenne qui doit dépasser historiquement les vieux Etats nationaux. Ce qu’il reste donc à faire, c’est de « radicaliser » la démocratie bourgeoise et de « convertir » l’UE en une « Europe démocratique et sociale ». L’instrument pour cela serait « la convocation à une Assemblée constituante européenne, élue par suffrage universel, pour définir une architecture démocratique du parlement, du gouvernement simplifié et des autres institutions européennes ». Tout comme il s’agissait pour les révolutionnaires au 19e siècle, à l’époque de Marx et Engels, de participer en première ligne à la tâche historiquement nécessaire et progressiste de la construction des Etats nationaux unifiés bourgeois en Allemagne et en Italie, face au retard dans cette constitution, pour le PGE, il en serait de même aujourd’hui dans le cas de l’UE. Et bien sûr, la lutte pour la révolution socialiste européenne est mise en attente pour une autre période historique. La politique des partis du PGE reflète son option de classe : comme ils ne veulent pas affronter la bourgeoisie de leurs propres pays, ils ne peuvent pas non plus remettre en question l’ordre impérialiste européen.

Le caractère transitionnel de la consigne de Rupture avec l’UE

Le mot d'ordre de rupture avec l’UE touche le cœur même du programme de la révolution européenne et reflète en même temps la compréhension théorique de son caractère et de sa dynamique. La théorie de la Révolution permanente pose que les révolutions dans chacun des pays font partie de la révolution socialiste internationale, qui combine différentes tâches et révolutions dans la marche vers la révolution mondiale.[4] La présence de pays impérialistes et de pays semi-coloniaux au sein de l’UE oblige à combiner de façon inégale les tâches démocratiques et transitionnelles dans chaque pays, et de les incorporer comme une partie de la révolution socialiste européenne et internationale. Face au faux dilemme entre la négation de la domination impérialiste dans l’UE et la proposition d'une issue nationaliste, il faut réaffirmer l’alternative internationaliste et révolutionnaire.
   Le Parti communiste portugais (PCP – qui dirige la CGTP, la principale centrale syndicale du pays) est un modèle concernant l'issue nationaliste. Il rejette « une intégration européenne marquée par la soumission et le sous-développement du Portugal » et pose donc la rupture avec l’UE. Mais après la rupture, il propose « une politique patriotique de défense des secteurs productifs nationaux et la substitution des importations par la production nationale ». Pour récupérer la souveraineté, le PCP propose de lier la classe ouvrière portugaise à une supposée bourgeoisie nationale productive et patriotique. Mais le problème est qu'il n’existe pas de « solution nationale », ni de « récupération de la souveraineté » dans une économie structurellement soumise au capital financier et aux multinationales. La rupture avec l’UE et l’euro, tout en étant absolument nécessaire, ne résout rien par elle-même, parce que les intérêts des travailleurs ne se heurtent pas seulement à un facteur externe – l’impérialisme –, mais aussi à une structure capitaliste interne, dépendante et intégrée dans le système global. C'est pourquoi la bourgeoisie portugaise n’est pas disposée à affronter l’impérialisme. Mais le PCP non plus : face au problème crucial de l’endettement de l’Etat avec la banque impérialiste et les banquiers « nationaux », il ne va pas au-delà de la renégociation de la dette publique (les délais, les intérêts…) c’est-à-dire le maintien intact de la domination de l’impérialisme sur le Portugal.
   A l’autre extrême, une partie importante de la gauche, qui ne vient pas de la tradition stalinienne, fait abstraction de la domination impérialiste, comme si elle n’existait pas. C'est le cas du Bureau Exécutif de la IV Internationale[5] qui disait en juillet 2003 : « Avec l’approfondissement de la crise, la régression sociale s’identifie avec l’UE et à l’euro, et nous comprenons le sentiment populaire croissant de rejet envers l’euro et l’Europe. Cependant, c’est poser le problème à l’envers, surtout si la sortie de l’euro a lieu dans une économie qui continue d'être capitaliste, et équivaudrait donc à une dévaluation massive qui serait une autre forme d’austérité contre les peuples. » Mais les travailleurs ne se trompent pas quand ils identifient la régression sociale avec l’UE ! Et, d'autre part, qui dit que la sortie de l'euro (et de l'UE) ne peut pas – ne doit pas – faire partie d'un programme anticapitaliste et internationaliste ?
   Le rejet de l’UE est un pas vers le mot d'ordre de Rupture, qui, dans les pays dominés, est un pont pour disputer la conscience des travailleurs et la faire avancer vers les mesures anticapitalistes de transition nécessaires pour défendre le pays : suspension (non-paiement) de la dette, expropriation de la banque et étatisation des branches et entreprises stratégiques sous le contrôle des travailleurs. La domination impérialiste est une partie structurelle du capitalisme et en est l'expression dans les pays dominés. Le programme marxiste révolutionnaire ne sépare pas la tâche de la libération nationale de la lutte contre l’austérité et les attaques contre les travailleurs, car l'exploitation de ceux-ci de la part de la bourgeoisie périphérique se combine avec la domination impérialiste et y est subordonnée. Si, au lieu de défendre la rupture avec l’UE, nous allons rappeler à l'ordre les travailleurs en leur disant qu’ils posent le problème « à l’envers » et qu’il s’agit de « lutter contre le capitalisme », nous abandonnons la lutte contre l’UE à l’extrême droite, aux nationalistes et aux populistes.
   La lutte contre l’UE exprime le caractère international de la révolution socialiste sur le continent européen, parce qu’elle unit les intérêts des travailleurs de tout le continent. Tandis que le prolétariat dans les pays dominés et sous intervention doit poser la rupture avec l’UE, dans les pays impérialistes centraux, il s’agit de mettre en avant-plan la lutte contre son propre impérialisme, ce qui signifie défendre la dissolution de l’UE, qui est la machinerie qui centralise et met en œuvre les attaques impérialistes. Les intérêts de classe doivent s’exprimer dans des tâches communes pour le moment présent, sur la base de l’internationalisme ouvrier. La dissolution de l'UE, la rupture avec elle, loin d'être un replie sur le « nationalisme », est le point de convergence qui peut unir les prolétariats des deux bouts de la chaîne de domination impérialiste européenne, dans leur lutte commune contre l’ajustement structurel.

La lutte pour les Etats socialistes d'Europe

Notre rejet catégorique de la caricature impérialiste de l'unité européenne n'implique pas la défense de la « patrie nationale ». Au contraire, notre programme doit récupérer l'internationalisme et rétablir le fil historique de la meilleure tradition du mouvement ouvrier, coupé à l'époque par la bureaucratie stalinienne et sa théorie réactionnaire du « socialisme dans un seul pays ».
   Dans sa réponse à Kautsky, qui défendait en 1911 « l'union des Etats de la civilisation européenne dans une confédération », c'est-à-dire « les Etats-Unis d'Europe », comme moyen pour atteindre « la paix éternelle »,[6] Rosa Luxembourg a fait valoir que « la solution d'une fédération européenne ne peut pas signifier, objectivement, au sein de la société capitaliste, autre chose qu'une guerre douanière contre les Etats-Unis [...], ainsi qu'une lutte raciale, coloniale et patriotique dans l'arène politique ».[7] En 1915, en pleine guerre mondiale, la Conférence bolchevik à l'étranger ouvra le débat sur ce mot d'ordre, dans le cadre de l'élaboration du programme du parti contre la guerre impérialiste. Avant la Conférence, le manifeste du Comité Central avait fait valoir que « le mot d'ordre politique immédiat des sociaux-démocrates[8] de l'Europe doit être la formation des Etats-Unis républicains d'Europe ». Et, à différence de la formulation pacifiste de Kautsky, il y ajouta que « les sociaux-démocrates doivent dévoiler toute la fausseté et l'incohérence de ce mot d'ordre, si les monarchies allemande, autrichienne et russe ne sont pas renversées par la révolution ».[9]
   Lénine, cependant, suivant les traces de Rosa Luxembourg, rejeta le mot d'ordre, en précisant qu'il ne le remettait pas en cause pour son caractère démocratique : « Les révolutions politiques ne peuvent jamais, dans aucun cas, quelles que soient les circonstances, affaiblir le mot d'ordre de la révolution socialiste. » Cependant, le mot d'ordre ne peut pas faire abstraction de l'existence de l'impérialisme et de la guerre, étant donné que, dans ces circonstances, « les Etats Unis d'Europe pourraient exister uniquement comme un accord des capitalistes européens sur la façon de noyer ensemble le socialisme en Europe, de défendre ensemble les colonies volées, contre le Japon et l'Amérique du Nord ».[10]
   Lors de son quatrième Congrès, en 1923, après la victoire de la révolution en Russie et la montée du prolétariat dans la moitié de l'Europe, notamment en Allemagne, la Troisième Internationale posait de nouveau l'unité européenne comme une tâche de la classe ouvrière qui devrait, « dans sa lutte pour s'emparer du pouvoir politique, réparer les ruines de la Guerre mondiale et commencer la construction d'une République fédérative des Soviets d'Europe ». Il en résulte un changement dans la nature du mot d'ordre, qui devient l'axe stratégique de la révolution socialiste en Europe, à son tour partie de la révolution mondiale.
   Des années plus tard, le sixième Congrès de la Troisième Internationale, déjà contrôlé par la bureaucratie stalinienne, retire le mot d'ordre du programme. Trotsky a dit alors : « La formule des 'Etats-Unis soviétiques de l'Europe' est précisément l'expression politique de l'idée que le socialisme est impossible dans un seul pays. »[11] C'est précisément ce que la bureaucratie voulait cacher. Le développement de la révolution européenne était incompatible avec la contre-révolution bureaucratique en URSS, ce pour quoi la caste stalinienne a travaillé sans ménagement pour empêcher que le prolétariat européen puisse prendre le pouvoir.
   L'UE, en tant qu'accord entre les grands Etats impérialistes de l'Europe, ne joue plus aujourd'hui le rôle que Rosa et Lénine ont signalé, il y a un siècle, de la défense de la suprématie impérialiste mondiale européenne contre les Etats-Unis. Actuellement, les impérialismes européens, bien qu'ils aient des frictions et des disputes entre eux, ne disputent déjà plus l'hégémonie des Etats-Unis, qui précisément favorisait l'intégration européenne après la Seconde Guerre mondiale. Cependant, l'essence impérialiste du capitalisme européen et de l'UE s'est déployée en bonne et due forme après que la bureaucratie stalinienne restaura le capitalisme en URSS, quand les impérialismes européens ont incorporé les pays de l'Est à l'UE comme de véritables pays semi-coloniaux, dominés par les grandes banques et les multinationales allemandes. Ces impérialismes dévoilent aussi leur essence, lorsqu'ils défendent les intérêts de leurs multinationales dans le monde et qu'ils collaborent avec les interventions militaires étasuniennes ; ainsi qu'avec leur présence néo-coloniale en Afrique ; avec leur politique de progression vers « l'Est » ; avec le pillage de la périphérie européenne et leur offensive générale contre toute la classe ouvrière du continent. Le programme révolutionnaire doit répondre à cette réalité.
   Notre défense intransigeante de la rupture avec l'UE et l'euro dans les pays dominés ne se confond pas du tout avec la défense de l'Etat national, étant donné que « l'objectif du prolétariat n'est pas la défense de l'Etat national, mais sa liquidation totale et absolue, puisqu'il s'agit d'un énorme obstacle au développement économique et culturel de l'humanité ».[12] Le sens de l'UE n'est pas le dépassement des Etats nationaux, mais la domination impérialiste sur ces derniers. Par conséquent, dans les pays dominés, nous posons la rupture avec l'UE, et dans les pays impérialistes centraux, sa destruction. Nous affirmons que seul le prolétariat peut unifier l'Europe, et que, par conséquent, le premier acte de sa victoire sera d'abolition des traités de l'UE. La rupture avec l'UE n'est pas un mot d'ordre isolé ; elle implique un système de mots d'ordre transitoires qui doit pointer vers la constitution de Gouvernement des Travailleurs.
   Le mot d'ordre des Etats socialistes d'Europe, qui récupère la tradition internationaliste détruite par le stalinisme et suit l'approche proposée par Trotsky au 4e Congrès de la Troisième Internationale, « se situe dans le même contexte historique que celui du 'gouvernement ouvrier et paysan' ; c'est un mot d'ordre de transition, indiquant une issue, une perspective de salut, et il fournit à la fois un élan révolutionnaire aux masses travailleuses ».[13] En prenant en compte les grandes différences entre les pays, ce mot d'ordre exprime la dynamique générale du processus révolutionnaire européen, et dans le même temps, l'impossibilité de construire le socialisme dans un seul pays.
   Dans sa critique du document européen du Secrétariat unifié, Moreno soulevé en 1973 : « Le mot d'ordre des Etats-Unis socialistes d'Europe ne se trouve pas parmi les dix principales tâches de cette étape. Il n'est mentionné que comme un axe secondaire de propagande. Toutefois, quand Trotsky formula ce mot d'ordre, il le fit sur la base d'une question théorique (la théorie de la révolution permanente, en particulier son caractère international) et d'une question de la réalité concrète (l'unité spécifique de la révolution européenne). Cette dernière caractéristique a été renforcée par l'unité, de plus en plus grande, du capitalisme européen au cours des dernières décennies. »[14] L'existence de l'Union européenne rend plus actuels que jamais les mots de Moreno, et nous amène à souligner plus que jamais l'unité spécifique de la révolution européenne, la nécessité d'être plus internationaliste que jamais. Pour l'union libre et volontaire des Etats socialistes d'Europe.

Le droit à l'autodétermination nationale

Une des conséquences de l'ajustement structurel profond auquel l'Europe est soumise est le développement d'importants mouvements de désintégration dans plusieurs de ses Etats. Les plus importants se produisent dans l'Etat espagnol, où le problème de l'unité espagnole, jamais résolu par la bourgeoisie, refait surface. Ainsi, nous voyons le puissant mouvement nationaliste en Catalogne, la région la plus industrialisée de l'Etat espagnol, où plus d'un million de personnes (sur 7,5 millions) sont descendues dans la rue le 11 septembre 2013 pour réclamer l'indépendance. La LIT considère ce mouvement national comme un fait progressiste face au régime espagnol qui, étant issu du régime de Franco, nie le droit légitime à l'autodétermination au peuple catalan (et au basque et au galicien ). La LIT défend résolument le droit à l'autodétermination de la Catalogne, ou, ce qui revient au même, son droit à l'indépendance si telle est la volonté de la majorité du peuple. Mais pour nous, à la différence des nationalistes catalans bourgeois et petits-bourgeois, le droit à l'autodétermination n'est pas un instrument de séparation, mais un outil nécessaire pour réaliser l'unité de la classe ouvrière des différentes nationalités de l'Etat espagnol et pour sceller une alliance entre ses peuples. Par conséquent, avec la revendication du droit à l'autodétermination, nous défendons une Union libre de Républiques ibériques.
   En outre, les conflits de nationalité ont d'emblée une dimension carrément européenne, ce qui n'était pas le cas auparavant. Et cela implique que la lutte pour l'autodétermination des Catalans fait partie de la bataille contre l'UE. Ce n'est pas étonnant que les organismes de l'UE aient pris position en défense du gouvernement espagnol et pour l'unité espagnole forcée. La souveraineté des peuples est également incompatible avec l'UE, et ne peut être atteinte qu'en avançant vers une Europe socialiste des travailleurs et des peuples.
   A côté de l'Etat espagnol, il y a d'autres mouvements, comme celui de l'Ecosse, où un référendum sur l'indépendance est prévu en septembre 2014, un referendum sur lequel le gouvernement britannique de Cameron et le gouvernement régional écossais se sont mis d'accord. Mais l'Ecosse « indépendante » proposé par les nationalistes écossais garderait Elizabeth II comme « reine des Ecossais », continuerait avec la livre sterling et resterait dans l'UE et dans l'OTAN. Par contre, l'unité de la classe ouvrière britannique serait fortement malmenée. Quant aux mouvements comme celui de la Ligue du Nord italienne, soutenant la sécession de la « Padanie » (le nord de l'Italie), il s'agit d'un phénomène ouvertement réactionnaire et raciste que nous combattons résolument en tant que LIT.

 

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3. Une nouvelle composition du prolétariat européen

Le mot d'ordre du capital financier impérialiste est la précarité. Depuis 2008, les minijobs représentent 25 % des contrats de travail en Allemagne, c'est-à-dire qu'un travailleur sur quatre touche un salaire inférieur à la valeur de sa force de travail. D'autres euphémismes, comme les Zero Hour Contracts (Angleterre), les Accords de compétitivité (France) ou les Cooperativas (Italie), reflètent la même politique, visant à créer une vaste couche de travailleurs précaires dans les pays impérialistes centraux et installant une partie de la classe ouvrière dans des conditions de travail similaires à celles où précédemment se trouvait le prolétariat immigré. Cependant, dans la périphérie, la précarisation est la norme pour tous les nouveaux contrats et seule une minorité des travailleurs maintiennent les conditions antérieures. La tendance générale à travers le continent est un changement dans la composition elle-même du prolétariat, dont la résistance aux nouvelles normes d'exploitation pousse à un processus de réorganisation profond et complexe.
   Les millions de travailleurs en situation précaire sont le résultant d'une politique structurelle du capital qui est en train de modifier la composition du prolétariat, partiellement ou de façon majoritaire selon le pays et la violence de l'ajustement. Il s'agit des travailleurs de l'ancienne génération, jetés au chômage ou soumis à de nouvelles conditions d'exploitation et qui ne reviennent déjà plus aux conditions d'avant la contre-réforme. Il s'agit des nouvelles générations, dont la précarité est le présent et l'avenir. Et il faut ajouter à cela le prolétariat immigré, qui a été historiquement en situation précaire et qui fait maintenant, en outre, l'objet d'une intense pression xénophobe.
   Tout cela débouche sur un phénomène qui n'avait existé qu'au lendemain de la guerre mondiale : le chômage structurel, qui est utilisé par les patrons et les gouvernements en Espagne, au Portugal, en Grèce ou en Italie pour imposer une précarisation accélérée. Les appareils bureaucratiques politiques et syndicaux, dont la fonction sociale a été pendant des décennies la cogestion de l'Etat providence, sont devenus les gestionnaires du nouveau modèle d'exploitation du prolétariat. La tendance à la crise de ces appareils est proportionnelle à la résistance des travailleurs à l'ajustement.

Les secteurs opprimés : les femmes, les immigrants et les jeunes

La violence de l'ajustement structurel a des implications encore plus profondes sur les secteurs opprimés du prolétariat. L'augmentation de l'exploitation se manifeste dans une augmentation de l'oppression des femmes. L'écart salarial avec les hommes, en Allemagne (22,3 %), en Espagne (16 %), au Portugal (12,8 %) ou en Italie (5,3 %), s'agrandit encore quand on considère uniquement le secteur privé, où il atteint respectivement 25,8 %, 28,25 %, 23,5 % et 16,7 %.[15] En outre, dans certaines branches où le contrat précaire est prédominant, l'écart de salaire atteint 30 %. Et la tendance est à l'élargissement de l'inégalité, car la majorité absolue des contrats précaires s'accumulent chez les femmes. Dans le cas de l'Espagne, celles-ci occupent 80 % des contrats à temps partiel.
   Les femmes sont doublement affectées par l'ajustement : les coupes, en plus d'augmenter l'écart salarial avec la précarisation, impliquent aussi la réduction ou la destruction pure et simple des services publics (places dans les crèches, soins pour les personnes âgées, etc.), ce qui mène à une intensification du travail non rémunéré, assumé principalement par les femmes dans les ménages. En outre, les attaques sont concentrées dans des secteurs tels que la santé et l'éducation, où la force de travail féminine est majoritaire. La violence est la face la plus brutale de l'oppression dans les pays présentés comme un modèle d'égalité et de développement : entre 40 et 50 % des femmes ont été victimes de violence en Finlande, en Suède et en Allemagne, ce qui ne fait que confirmer que le capitalisme n'est pas seulement incapable de mettre fin à l'oppression, mais aussi de maintenir les acquis démocratiques minimaux acquis par les femmes dans leur lutte contre l'oppression machiste. La lutte contre l'oppression est indissociable de la lutte pour obtenir l'unité du prolétariat contre l'exploitation.
   Dans plusieurs pays européens se développe une campagne xénophobe qui rend les immigrés responsables du chômage, les accusant de « voler » l'emploi des autochtones. En Europe occidentale, la Ligue du Nord en Italie, le Front national français et Aube dorée fasciste, encouragés par les mesures gouvernementales contre les immigrés, font des campagnes racistes leur axe politique central. Dans l'Est (la Hongrie et la Bulgarie), nous avons la persécution des Roms, menée par les partis Jobbik et Ataka ; et en Russie, il y a l'agissement contre les travailleurs kirghizes, moldaves, tadjiks, ouzbeks, soutenu par les organisations nationalistes, qui transforment les travailleurs immigrés en boucs émissaires. Dans tous les cas, l'objectif est le même : diviser le prolétariat, empêcher les travailleurs à découvrir les vrais coupables du chômage et des coupes. La campagne de l'extrême droite, accusant les immigrés d'être responsables de la diminution des salaires des travailleurs autochtones, est une tromperie. La force de travail immigrée dans l'UE n'est que de 4 % de la main d'œuvre, et en outre, elle est employée dans les pires emplois, les plus précaires, et sans droits. La réduction des salaires est promue par les patrons et les gouvernements.
   Mais quand l'impérialisme français a montré toute sa puissance contre... une fillette du Kosovo, expulsée de l'école et déporté sans ménagement ; quand trois bateaux assistent, impassibles, au naufrage et à la mort de plus de 360 personnes, dont des enfants, à Lampedusa, et ne font rien pour aider les survivants, nous avons à faire avec le résultat de l'action de certains gouvernements qui encouragent le harcèlement avec des lois qui criminalisent toute aide aux « illégaux », qui expulsent ceux-ci sommairement ou les emprisonnent, alors qu'ils n'ont commis aucun crime, dans de vrais camps de concentration. Ce sont les gouvernements de Hollande, de Cameron ou de Poutine qui sont les responsables de la persécution. Nous devons lutter pour l'abrogation immédiate de la législation de persécution et des obstacles pour obtenir un visa. Les travailleurs immigrés font partie du prolétariat européen, ils sont son secteur le plus exploité ; et la politique des révolutionnaires est de promouvoir leur organisation. La grève des travailleurs des Cooperativas en Italie, principalement composées d'immigrants, est un exemple dans ce sens. Nous devons poser la lutte contre les inégalités de salaire et pour les droits syndicaux et politiques, pour le droit de diriger leurs communautés dans les quartiers, avec la reconnaissance de leurs représentants, et pour le maintien de leurs croyances, leur langue, leur culture et leurs coutumes.
   Les jeunes, dans leurs différentes couches sociales, font partie de l'avant-garde dans la plupart des combats en Europe. Les systèmes éducatifs de tous les pays, entraînés par la stratégie de l'UE, ferment la porte aux jeunes travailleurs pour continuer leurs études. Aujourd'hui, seulement 25 % des enfants de travailleurs arrivent à l'enseignement supérieur. Cela est dû, en premier lieu, aux coupes (qui ont donné lieu, par exemple, à la fermeture de grandes universités grecques), à l'augmentation des droits d'inscription, à la baisse des bourses et à la diminution de ressources matérielles et de professeurs. L'enseignement public est de plus en plus déficient, alors qu'une minorité possédante envoie ses enfants à l'éducation privatisée.
   Les perspectives d'emploi sont encore pires. La jeunesse est victime des taux les plus élevés de chômage en Europe, et en particulier dans la périphérie. Ceux qui obtiennent un emploi le trouvent dans les nouvelles conditions de travail, avec des contrats qui sont renouvelés pour des mois et les contrats Zero hours sans journée fixée et qui changent tous les jours, etc. Et quand quelqu'un obtient un travail « fixe », il est soumis à la double échelle convenue par la bureaucratie (les « nouveaux » ayant un salaire inférieur à celui des travailleurs en place dans la même catégorie). La jeunesse européenne a vu disparaître de son horizon l'image de la prospérité de l'Europe et les illusions de stabilité. C'est pourquoi elle descend en masse dans la rue, que ce soit en Grèce, au Portugal («  La génération précarisée » ) ou dans le 15M espagnol. La jeunesse précarisée n'est pas prisonnière des liens avec les anciens appareils, mais dans le même temps, l'expérience de combat lui manque. Les phénomènes politiques libérales-anarchiques, qui sont une réaction contre la bureaucratie des organisations réformistes, jouent aussi un rôle réactionnaire, car ils se dressent comme un obstacle à la centralisation et la continuité des luttes, qui ont tendance à se produire dans des manifestations explosives dans la rue.

 

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4. La réorganisation politique et syndicale en Europe

Le changement des relations entre les classes a donné lieu à un phénomène politique : la réorganisation politique et syndicale du mouvement de masses. Les bases objectives du processus de réorganisation sont développées de façon inégale selon le caractère de l’ajustement et sa déclinaison dans les pays, le degré de résistance sociale, la crise historique des appareils bureaucratiques et la nouvelle composition du prolétariat. La combinaison de ces éléments donne lieu à un phénomène politique dans le continent, marqué par une profonde contradiction : il y a, d'une part, la tendance à la fin du monopole de la représentation politique et syndicale des appareils traditionnels, dont le strict contrôle sur le prolétariat a permis la stabilité des régimes depuis la post guerre. On ne peut toutefois déduire de cette tendance une évolution linéaire du prolétariat vers le programme révolutionnaire. Les forces qui disputent cet espace sont multiples. Et le facteur subjectif, la crise de la direction révolutionnaire, est également un élément objectif central dans le développement de la conscience des masses.

La crise de la social-démocratie

Les appareils politiques qui contrôlent le mouvement ouvrier européen depuis l'après-guerre (qu'ils soient d'origine sociale-démocrate ou stalinienne), avec la complaisance des bureaucraties syndicales, ont défendu inconditionnellement l'UE, la présentant comme un modèle d'intégration qui mettrait fin aux inégalités sur le continent. Ce sont les gouvernements des partis sociaux-démocrates (sociolibéraux) qui imposèrent les « critères de Maastricht » et adoptèrent la « stratégie de Lisbonne », avec laquelle a commencé, au début des années 1990, l'ajustement structurel qui devrait faire de l'Europe « la région la plus compétitive du monde ». Actuellement, ces partis sont entrés dans une crise historique, qui va de pair avec le démantèlement de l'Etat providence qui était historiquement la justification de son existence. Les réformes de l'Agenda 2010 du gouvernement Schröder en Allemagne ont amené les coupes sociales les plus dures depuis 1949. Comme disait cet ancien chef du gouvernement : « Nous avons libéralisé notre marché du travail et mis en œuvre l'un des meilleurs secteurs à bas salaires qui existent en Europe. »
   Les liens organiques de ces partis avec le capital ne leur permettent pas de se distancier tant soit peu de l'ajustement structurel en cours, comme le montre la politique de Hollande en France. La pression fondamentale sur ces partis n'est déjà plus la vieille aristocratie ouvrière qui formait historiquement sa base sociale et était représentée par la bureaucratie syndicale, mais le capital financier. Schröder est le président de la société d'énergie russo-britannique TNK-BP, du consortium de gazoducs Nord Stream (BASF associée avec Gazprom), et il est membre du conseil de la Rothschild Investissement Bank. Quelque chose de semblable se passe avec les ministres de ces partis : Felipe Gonzalez est conseiller de Gas Natural et il en va de même pour le PS portugais. La crise de la FGTB de Charleroi - Hainaut Sud avec le PS belge, ou le malaise entre le Parti travailliste britannique et la bureaucratie syndicale, sont l'expression du fait que la tendance au démantèlement de l'Etat providence s'accompagne de la destruction des liens matériels avec ces appareils, de secteurs de plus en plus amples du prolétariat.
   Le désastre électoral du SPD en 2008 et en 2013, accompagné par le Parti travailliste britannique, qui a eu en 2010 son plus mauvais résultat depuis 1931, est l'expression de ce phénomène. La même chose s'est produite pour le PSOE espagnol. Nous avons vu la défaite électorale du PS portugais et l'effondrement du PASOK grec, deux partis qui ont signé le Mémorandum de la Troïka. Bien sûr, il ne faut pas déduire de leur crise historique qu'ils ne sont plus en mesure d'entrer aux gouvernements, mais ils ne pourront déjà plus jouer le rôle d'antan. En dépit de l'inégalité de la lutte de classes entre les pays, la tendance la plus probable est que les partis qui ont leurs racines dans la social-démocratie ou dans le stalinisme (comme le PD italien) ne soient plus en mesure de contrôler le mouvement de masses, comme cela a été le cas pendant des décennies. Le processus en cours a commencé à changer essentiellement le paysage politique de l'Europe occidentale d'après-guerre, qui était resté essentiellement stable jusqu'à il y a quelques années, en libérant des forces à la droite et à la gauche.

L'extrême droite et le fascisme

La montée de l'extrême droite française du Front National de Marine Le Pen fait partie d'un phénomène politique qui va au-delà de la France. Cependant, il s'agit d'une organisation parlementaire intégrée au régime de la démocratie bourgeoise, qu'il faut différencier des organisations carrément fascistes. Le discours de Le Pen contre l'UE et l'euro accompagne la décadence de l'impérialisme français face à l'Allemagne. Sa haine contre les immigrés est l'expression de la perte de l'empire colonial français et de sa défaite face à la lutte des peuples colonisés d'Afrique. C'est clair, quand on voit que son programme commence par : « Encourager la mémoire de l'Armée d'Afrique, qui a gagné du prestige dans la libération de la France et dans la défense de l'Empire, afin de faire connaître à la jeunesse de la France sa diversité et ses sacrifices, qui ont leurs racines dans la fraternité armée. »
   Bien que l'extrême droite ne soit pas l'option politique prioritaire du capital financier français, ces processus politiques impriment leur propre rythme et l'augmentation de la polarisation sociale, et leur discours populiste – vociférant contre les banquiers et pour la ré-industrialisation de la France afin de lutter contre le chômage et le déclin social – s'est ouvert son chemin électoral parmi des secteurs du prolétariat français, profitant du vide politique créé par le fait qu'aucune organisation du travail tant soit peu importante ne soulève la destruction de l'UE à partir d'un point de vue de classe, anti-impérialiste et internationaliste.
   L'extrême droite, avec son discours raciste et xénophobe envers les immigrants et les pays du Sud, devient la troisième force parlementaire au Danemark, en Finlande et aux Pays-Bas. En Autriche, elle est arrivée à la deuxième place lors des dernières élections. Cette croissance s'explique par la promesse non tenue de l'unité de l'Europe sous l'impérialisme et par le processus de faillite de secteurs de la petite bourgeoisie et des classes moyennes. En renforçant l'opposition économique entre les pays – la contrepartie de l'excédent allemand étant le déficit pour les autres – l'UE augmente les antagonismes ; et le nationalisme impérialiste en est une expression politique dans les pays centraux. Le nationalisme impérialiste, le racisme et la xénophobie – en tant que face la plus abominable de l'impérialisme et de sociétés qui sont empêtrés dans leurs propres contradictions et les exacerbent – sont aussi le reflet de l'ajustement structurel entre fractions bourgeoises, et de l'incapacité impérialiste pour unifier l'Europe.
   Aube Dorée en Grèce ou Forza Nuova en Italie sont d'une nature différente. Dans le premier cas, l'existence d'un appareil paramilitaire, en plus de l'appareil politique, marque une différence de cette organisation par rapport à la droite parlementaire. Cet appareil, engagé dans l'assassinat et la persécution des immigrés, a essayé de se tourner vers le mouvement ouvrier,[16] quoiqu'il ait été mis en échec par une réaction du mouvement de masse. Le poids électoral et social de cette organisation en fait toutefois une réelle menace pour le mouvement ouvrier. Aube Dorée, financée et soutenue par des secteurs significatifs de la bourgeoisie grecque, sort des entrailles de l'appareil répressif de l'Etat et ouvre la voie à la répression directe des organisations du mouvement ouvrier. Les partis traditionnels tombés en ruines, qui soutenaient le régime et ses institutions démoralisées et qui se limitent à mettre en œuvre le diktat de la Troïka, sont incapables, organiquement, d'arrêter l'action de cette bande d'assassins. On ne peut avoir aucune confiance dans le système pour les arrêter. Le Front unique ouvrier, l'organisation de l'autodéfense et la mobilisation des masses sont une nécessité, non seulement pour vaincre le fascisme, mais aussi pour vaincre les plans de faim et de destruction du pays et pour ouvrir la voie révolutionnaire.

La crise des appareils bureaucratiques et le rôle du néo-réformisme

La majorité de la classe ouvrière européenne était liée par des liens matériels à la fausse idéologie selon laquelle les appareils syndicaux et parlementaires bureaucratiques représentaient une barrière de défense de ses conquêtes et non pas un agent de l’impérialisme à l’intérieur du mouvement ouvrier. En rompant les liens matériels qui liaient un large secteur du prolétariat à ces appareils, les barrières construites par cette fausse conscience se fissurent et nous confrontent à une crise historique de la social-démocratie (SD), qui entraîne dans son sillage les partis communistes (PC) qui avaient un poids de masses. Ce processus, qui se développe inégalement selon les pays, génère deux phénomènes : d’un côté, il met fin à la fidélité électorale historique envers la SD (et les PC), et, d’un autre côté, il fait que pour un nombre croissant de luttes, les appareils syndicaux traditionnels ne sont déjà plus la médiation incontournable. Au contraire, l’avant-garde semble y faire face, les considérant comme complices des ajustements.
   Les privilèges des bureaucraties syndicales, matériellement liées à l’Etat bourgeois et aux grandes entreprises (via la participation dans les fonds de pension ou dans les conseils d’administration), ne résident plus essentiellement dans la gestion des conquêtes du prolétariat. Comme partie intégrante des régimes bourgeois, et de plus en plus en proie aux contradictions, elles s’appuient sur la division des travailleurs entre ceux qui conservent le standard antérieur, et les précarisés, abandonnés aux mains des patrons. Leur nouveau rôle, en tant que vrais gourous du patronat, est d’impulser l’ajustement et de gérer les nouvelles relations de travail. Leur complicité avec les attaques contre le prolétariat – particulièrement dans la périphérie et parmi les jeunes travailleurs – combinée aux luttes de résistance, donne lieu à des désaffiliations et à des ruptures. La jeunesse précarisée ne connaît que la face de complicité avec les patrons de cette bureaucratie privilégiée et corrompue.
   Des secteurs de plus en plus larges des masses s'incorporent à la lutte, se politisent et se radicalisent à la chaleur de la bataille. Mais c’est un processus très inégalitaire, qui se réalise à des moments distincts et est marqué par la division imposée aux travailleurs par les appareils bureaucratiques. Les secteurs récemment incorporés à la lutte sont plus arriérés dans leur conscience. Les secteurs qui rompent par la gauche avec leurs directions traditionnelles ont tendance à passer par une phase de radicalisation à travers les appareils réformistes ou néo-réformistes qui apparaissent à gauche de ceux-ci : c’est le cas de Syriza, de IU en Espagne, du PTB en Belgique ou du Bloco de Esquerda et du PCP au Portugal. C’est là que nous nous rencontrons de nouveau avec certains partis staliniens convertis en appareils réformistes nationaux. Tous se partagent les tâches avec les appareils syndicaux et dévient la résistance vers la voie électorale.
   Les partis du Comité International (CI-IV, l'ancien SU), qui par leur implantation en Europe réunissent les conditions pour commencer une dispute avec le réformisme, se sont pleinement adaptés au régime de la démocratie bourgeoise avec leur stratégie de la construction de « partis anticapitalistes larges », autour d’un programme néo-réformiste « européiste » dont l'axe est la « réforme démocratique » de l'UE. Après l’abdication du programme, la conséquence inexorable de leur politique les a conduits à la dissolution de leur section portugaise dans le Bloco de Esquerda et à l’extinction officielle de leur section historique italienne.
   Mais d’autres secteurs de classe sortent également sur le devant de la scène comme protagonistes : la petite bourgeoisie et les classes moyennes ruinées par la crise. La mobilisation des Forconi en Italie et la lutte dans le Nord de la France contre l’écotaxe en sont des exemples significatifs. Dans tout processus révolutionnaire, la tendance de ces couches sociales est à leur division, car leur caractère hétérogène les empêche de formuler un programme qui leur est propre. Si le prolétariat se met à la tête du processus de luttes, il parviendra à attirer leurs secteurs les plus opprimés pour le programme de la révolution. Mais plus le facteur subjectif de classe est révolutionnaire et faible, plus les idéologies racistes, xénophobes et populistes gagnent de l’espace. Cela explique le poids qu’ont acquis l’extrême droite, et les phénomènes populistes comme le grillisme en Italie, qui trouvent un écho électoral également parmi des secteurs de la classe ouvrière, et qui rapidement tombent dans les bras de la grande bourgeoisie.
   En dépit de l’usure de la démocratie bourgeoise et les crises des régimes, la tendance la plus probable en cette période est la déviation de la résistance sociale vers les processus électoraux. C'est particulièrement le cas au Portugal, en Grèce et en Espagne, où le néo-réformisme (et le stalinisme recyclé) tend à se fortifier électoralement et arrive même, dans certains cas, à former un gouvernement (Syriza en Grèce) ou à participer dans une coalition (IU forme déjà un gouvernement avec le PSOE en Andalousie et le PCF forme une coalition avec le PS pour les élections municipales à Paris). Mais quel que soit le gouvernement en fonction, il n’y a pas d’autre manière de rompre avec l’ajustement que la voie révolutionnaire. Cette contradiction dans laquelle est plongée le néo-réformisme (et le stalinisme) tend à approfondir le processus de réorganisation dans la prochaine période.

Une politique révolutionnaire face à l'UE

Pour avancer dans la double stratégie de la construction d'un parti révolutionnaire et de la mobilisation des masses, il faut définir dans quel moment nous nous trouvons. L’analyse doit souligner les contradictions, auxquelles le mouvement de masses doit faire face, ses points faibles et ses forces ; et elle doit chercher la façon d'articuler – en tant que révolutionnaires, et dans la mesure de nos forces – une politique qui serve pour aider le mouvement à dépasser la crise de direction. En ce sens, il est tout à fait intéressant d’analyser comment s’exprime ce processus dans la grève et la « Marche noire » des mineurs espagnols en 2012, un conflit qui, par sa combativité et son potentiel, polarise la société espagnole et éveille la sympathie et la solidarité ouvrière internationales.
   Dans cette lutte, l’avant-garde était constituée par les secteurs précarisés de la mine privée, qui se sont organisés dans les villages miniers de manière indépendante de la bureaucratie et ont combattu de manière exemplaire. La bureaucratie syndicale a pris soin d'éviter le heurt avec le gouvernement (et avec l’UE) et a mené la grève à une impasse en ne proposant aucune réponse générale unifiée, ni la nationalisation des mines. IU, répartissant les tâches avec la bureaucratie syndicale de CC.OO., ne fut pas à la tête de la lutte et n’avança aucune proposition de nationalisation au parlement. Les camarades de Corriente Roja, notre section en Espagne, qui n’avaient aucune intervention directe dans le secteur, avancèrent la nationalisation des mines et jouèrent un rôle essentiel dans l’extension de la solidarité. Leur politique fut reprise par un secteur des activistes mineurs et atteignit son point culminant dans un rassemblement de masse à Madrid. Toutefois, l’essentiel du bilan de la grève ne fut pas que les revendications ne furent pas atteintes, ce qui était certain, mais que le secteur des militants parmi les mineurs, alternatif à la bureaucratie syndicale, ne fut pas capable de faire face à la bureaucratie et de lui disputer la direction de la grève. La dispersion a prévalu et la bureaucratie a pu imposer la démobilisation.
   Un second fait de grande importance fut l’irruption de la jeunesse précarisée, à laquelle s’ajoutèrent des secteurs des classes moyennes touchées par la crise, dans le mouvement de masses du 15-M[17] et celui de la « Geração a rasca » (génération précarisée), contre les gouvernements espagnol et portugais respectivement. La force et le caractère de masse du mouvement, ainsi que son action spontanée en dehors des appareils traditionnels, ne sont pas parvenus à compenser sa faiblesse. L’étape suivante exigeait d’unifier le mouvement en un organisme capable d’élever la lutte à un niveau supérieur d’affrontement, et à ouvrir la voie à l'alliance avec la classe ouvrière. Mais son avant-garde, sans programme, fut incapable de le faire. Le mouvement mis en route exprimait la contradiction la plus aiguë de la réorganisation : l’élément le plus progressiste de sa conscience, le rejet des appareils bureaucratiques politiques et sociaux, ne fut pas suffisant, et en l’absence d’un programme et d'une direction révolutionnaire pour les influencer, la majeure partie de ses militants sont restés prisonniers de l’anarcholibéralisme.
   La continuité de la bataille exigeait de nouvelles consignes et de nouvelles méthodes de lutte pour l’affrontement au régime, allant au-delà du rejet des partis institutionnels. L’absence de programme empêcha la centralisation et évita l’affrontement avec le régime. Sans programme et sans organisation supérieure, la continuité de la bataille était impossible et la tendance inéluctable fut la dispersion. Dans le cas du Portugal, le mouvement Que se lixe a Troika (composée par les appareils bureaucratiques) assuma le pouvoir de convocation, et en Espagne, le mouvement se dispersa dans des luttes sectorielles (éducation et santé) dirigées par les « mareas », tandis qu’un autre secteur était politiquement polarisé par l’indépendantisme des gauches en Catalogne. Les deux processus furent marqués par la fragmentation des secteurs qui se radicalisaient par la gauche en rupture avec les appareils.
   Il est possible d’identifier le même processus de dispersion mentionné ci-dessus en Italie, où une pléthore de « syndicats alternatifs » rend difficile la construction d’une alternative ayant un pouvoir de mobilisation indépendant de la CGIL. La tâche décisive du moment est donc celle de travailler pour la constitution d’un pôle alternatif qui combat la fragmentation de l’avant-garde et la division du prolétariat encouragées par la bureaucratie. La construction de ce pôle de classe exige une bataille contre les fausses illusions et le centrisme, en utilisant tout notre bagage, notre programme et notre conception organisationnelle. Cette lutte est nécessaire pour agglutiner les secteurs les plus décidés dans la lutte. En même temps, sans un renforcement du parti et l’incorporation du meilleur de l’avant-garde en lutte, il sera impossible d'articuler un pôle conscient et un programme qui réponde au potentiel qu'offre la lutte de classes et le processus actuel de réorganisation.
   Notre politique doit avoir comme orientation la nécessité de l’unité de classe pour lutter, ce qui signifie la promotion du lien avec les secteurs en lutte, indépendamment de la direction qu'ils ont. La dénonciation intransigeante de la bureaucratie ne remplace pas la bataille pour l’unité dans la lutte, ni le combat pour un programme d’indépendance de classe.
   En rejetant tout soupçon de sectarisme, d'ultimatums ou d'actions « exemplaires » typiques des sectes ultragauchistes, notre politique révolutionnaire doit se baser sur les nécessités de l’ensemble des travailleurs et être orientée vers l’action des masses.
   L’agitation et la propagande sont accompagnées d’une politique pour construire l’organisation révolutionnaire, définie par Lénine comme « le principal instrument de la classe ouvrière dans la longue histoire de ses préparatifs pour la révolution ». [18] Il n’y a pas de formule préconçue. Il faut ouvrir la voie à des secteurs qui se radicalisent dans la lutte et affrontent la bureaucratie. Plus grand est le pôle qui regroupe les militants, plus nous éviterons la tendance à la dispersion. Que ce soit en groupant des activistes qui se radicalisent à l’intérieur même des appareils, en constituant de nouvelles organisations ou en groupant celles qui existent, etc. La tactique dépend du rapport de forces et des traditions organisationnelles dans chaque pays.
   A partir de différentes tactiques, notre marque distinctive est la défense intransigeante de la mobilisation pour mettre à bas les plans d’ajustement, renverser les gouvernements et lutter contre le payement de la dette. C’est la lutte infatigable pour la démocratie ouvrière et contre la bureaucratie : Que les bases décident ! Non aux privilèges matériels des dirigeants ! C'est l’internationalisme ouvrier ! Rupture avec l’UE et l’euro, pour l’unité de la lutte des travailleurs en Europe !

 

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5. Axes pour un programme révolutionnaire

La stratégie à l'égard de l'UE est le point de départ pour définir les tâches dans les pays. Les frictions et les conflits entre les différents secteurs de la bourgeoisie impérialiste n'ont pas remis en question leur accord fondamental pour écraser ensemble les travailleurs, ce qui est l'essence de l'UE. Les impérialismes subalternes, et plus encore les bourgeoisies semi-coloniales, incapables de jouer un rôle indépendant sur le marché mondial, n'ont pas non plus hésité à appliquer dans leurs pays les plans d'ajustement, en fonction des exigences du capital financier impérialiste. C'est pourquoi la lutte contre l'impérialisme est inséparable de la lutte contre chacune des bourgeoisies et contre les gouvernements de ceux-ci.
   Il n'y a pas moyen de briser la spirale de coupes, de baisse de salaires et de réformes du travail et des pensions, de mettre fin au chômage, sans remettre en question les besoins les plus profonds du capital impérialiste et la division du travail sur le continent, bref, sans détruire l'UE. C'est-à-dire qu'il faut faire face à son propre impérialisme ou lutter contre lui dans les pays dominés.
   Les travailleurs sont la classe internationale dont les intérêts sont irrémédiablement incompatibles avec la domination impérialiste de l'UE. La classe ouvrière des pays impérialistes centraux, soumise au chantage des délocalisations, est confrontée au faux dilemme de baisser ses salaires et ses conditions de vie ou de subir le chômage. Pendant ce temps, les gouvernements de la périphérie soumettent les travailleurs à une course vers l'abîme : plus profonde est la baisse des salaires et le déclin social, plus « compétitif » est le pays pour attirer les entreprises qui délocalisent d'ailleurs. Dans ce jeu, il n'y a que la bourgeoisie impérialiste qui gagne. Les intérêts des travailleurs en tant que classe ne peuvent être exercés que dans son unité et dans une lutte internationale. L'essai de Grève générale européenne du 14 novembre 2012 a démontré que l'unité internationale est possible et nécessaire pour lutter contre l'ajustement, contre les gouvernements qui l'appliquent et contre l'UE qui le dirige. Il a démontré aussi le besoin de répondre par la grève générale européenne.
   La bureaucratie syndicale a la nostalgie du bon vieux temps de la « paix sociale » où les miettes tombées du banquet impérialiste lui permettaient de jouer le rôle de « co-gestionnaire efficace » de l'Etat providence. Mais actuellement il n'y a déjà plus de miettes à repartir, mais bien un ajustement brutal à imposer. La bureaucratie, occupée entièrement à défendre les intérêts de l'impérialisme et de ses bourgeoisies respectives, est devenue un instrument décisif pour l'application des plans d'ajustement et une pièce maîtresse pour la gestion des nouvelles conditions d'exploitation de la classe ouvrière, moyennant sa complicité active et passive. La lutte contre la bureaucratie est devenue l'une des principales tâches du mouvement ouvrier et une partie fondamentale du programme révolutionnaire. Pour la démocratie ouvrière dans tous les organismes des travailleurs ! A bas  la bureaucratie !
   NON aux coupes dans la santé, l'éducation et les services sociaux ! NON aux privatisations ! Logement social garanti. Abrogation des contre-réformes de la pension. Restitution des droits retirés et des services publics privatisés.
   Contre le paiement de la dette publique, le principal instrument de soumission des pays ! Les déficits avec laquelle les gouvernements justifient les coupes ne sont que l'outil pour l'expropriation du budget public afin d'assurer les bénéfices des banques créancières, qui tirent profit du parasitisme et de la spéculation. Prison et expropriation des biens pour les coupables de corruption.
   Expropriation des banques et leur unification pour centraliser le crédit en faveur de la réorganisation de l'économie, en garantissant les dépôts des petits épargnants. Contrôle du mouvement de capitaux et monopole du commerce extérieur. Moratoire de la dette des travailleurs, des paysans et des petits entrepreneurs menacés par le chômage ou la ruine.
   Abrogation des contre-réformes du travail adoptées pour faciliter les licenciements et les réductions de salaire et pour briser la négociation collective. Il est possible de mettre fin au chômage en répartissant le travail entre tous, sans réduction des salaires ! Il faut un plan global de travaux publics, sociaux et écologiques pour créer de l'emploi. Il faut étatiser les branches et entreprises stratégiques, sous le contrôle des travailleurs, en rouvrant les entreprises fermées et en réorganisant l'économie.
   A bas les contrats ordure ! Pour le droit au travail des jeunes : A bas la « double échelle » des salaires ! Non à la précarité des contrats et la réduction des salaires ! Pour la journée de six heures pour les étudiants qui travaillent.
   Luttons contre la violence machiste ! Pour le droit des femmes à disposer de leur propre corps. Non à l'inégalité des salaires : à travail égal, salaire égal. Pas de coupes, mais davantage de places dans les crèches. Contre toute oppression envers la communauté LGBT !
   Contre la xénophobie et le racisme ! Abolition de la directive de la honte et des lois de l'immigration. Démantèlement des centres de « détention » d'immigrants. Egalité de droits salariaux, syndicaux et politiques. Défense des travailleurs immigrés face à l'extrême droite et les fascistes.
   L'émergence de gouvernements techniques, l'autonomie progressive des gouvernements par rapport aux majorités parlementaires ou leur mépris pour les normes parlementaires sont des symptômes d'une dérive autoritaire, qui est accompagnée par des interventions alarmantes telles que la militarisation de la grève des travailleurs du métro d'Athènes, les réductions du droit de représentation syndicale dans les entreprises italiennes ou encore le projet de loi espagnol de sécurité civile, qui visent à briser la résistance ouvrière et populaire à l'ajustement. La défense intransigeante des droits démocratiques est devenue une tâche essentielle. A bas toutes les mesures contre la liberté d'expression et le droit d'organisation et de protestation !
   De la même façon, nous sommes pour le droit à l'autodétermination des nationalités opprimées, une revendication démocratique particulièrement ressentie par les nationalités historiques de l'Etat espagnol et mis au premier plan par la revendication catalane.
   La défense des libertés démocratiques ne doit toutefois pas être confondue avec la défense des régimes parlementaires tombés en ruine, marionnettes du capital financier, et incapables d'exprimer les besoins des travailleurs et la souveraineté des pays subjugués.
   L'UE ne se limite pas à soumettre les pays périphériques de l'Est et du Sud, elle est aussi un instrument des grandes puissances impérialistes européennes pour défendre leurs intérêts économiques et géopolitiques dans le monde. Son intervention en Afghanistan, au Liban et en Palestine, sa complicité honteuse avec la dictature génocidaire d'Al Assad en Syrie, sa politique d'annexion concernant l'Ukraine, les accords de libre-échange avec des pays africains ou latino-américains, ainsi que les interventions coloniales françaises en Afrique, définissent une politique impérialiste de pillage, toujours dans l'ombre des Etats-Unis. Nous exigeons le retrait de toutes les troupes d'occupation européennes de l'Afghanistan, de l'Afrique ou du Liban. Solidarité avec les peuples et les pays agressés ! Dissolution de l'OTAN et démantèlement des bases américaines en Europe !
   Contre le pillage impérialiste européen en Asie, en Afrique et en Amérique latine ! Nous soutenons la lutte des travailleurs contre la domination de leur pays. Nous exigeons l'annulation de la dette extérieure contractée par ces pays et l'abrogation des traités de soumission qui remettent en cause leur souveraineté. Que l'impérialisme dégage !
   Ceux qui gouvernent pour les banquiers et les capitalistes ne vont jamais toucher aux intérêts fondamentaux de ceux-ci, et encore moins les exproprier, alors qu'ils n'hésitent pas à attaquer les travailleurs. La lutte pour les revendications, pour la rupture avec l'Union européenne, exige l'ouverture de la perspective de gouvernements des travailleurs et du peuple, soutenus par la mobilisation et les organisations de base, démocratiques et de lutte. Ces gouvernements sont le premier acte dans la lutte pour une Europe des travailleurs et des peuples, pour l'union libre et volontaire des Etats socialistes d'Europe.

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[1] La dette privée au Portugal, en Espagne et en Irlande équivaut à respectivement 255%, 215% et plus de 300% du PIB. En Italie, 30% des petites et moyennes entreprises ne peuvent pas s'acquitter de leurs dettes.

[2] Thèses du 2e congrès du PGE, 2007

[3] R. Luxembourg, Friedens Utopien  - mai 1911,

[4] N. Moreno, Actualisation du Programme de Transition - 1980 - Thèse 39 Actualité de la théorie de la révolution permanente et de la loi du développement inégal et combiné.

[5] Lors du 15e Congrès de la IV Internationale, en 2003, de nouveaux statuts ont été adoptés et le « Secrétariat Unifié » (SU) a été remplacé par un Comité International (CI) et un Bureau Exécutif (BE).

[6] K. Kautsky. War and Peace, Justice.April 1911.

[7] R.Luxembourg, Friedens Utopien  - mai 1911,

[8] A cette époque, les bolcheviques, et en général les marxistes révolutionnaires, se désignaient eux-mêmes comme « sociaux-démocrates »

[9] La Guerre et la Social-démocratie de Russie. Septembre 1914.

[10] V.I.Lénine, Sur le mot d'ordre des Etats-Unis de l'Europe

[11] Le désarmement et les Estados Unidos de Europa. TheMilitant, 7.12.1929

[12] “La guerre et la IV Internationale, 10.06.1934

[13] Est-ce que c'est le moment approprié pour le mot d'ordre des Etats-Unis d'Europe ? 1923, Les cinq premiers congrès de l'Internationale communiste.

[14] Moreno, N. Le parti et la révolution, 1973

[15] Données de l'UE

[16] Le président du syndicat des métallos du Pirée, SotirisPulikogiannis, et d'autres membres du syndicat, tous membres du KKE, ont été attaqués brutalement par des membres d'Aube Dorée quand ils collaient des affiches ; par la suite, AD assassina le militant antifasciste Pablo Fyssas. La réaction des masses après cet assassinat a obligé le gouvernement à emprisonner certains députés d'AD et a mis cette dernière sur la défensive. Cette circonstance ne doit toutefois pas mener à sous-estimer AD.

[17] Le Mouvement des Indignés, formé à partir de la mobilisation du 15 mai 2011.

[18] V. I. Lénine, Discours dans l’acte de commémoration de Sverdlov, mars 1920.