Contre la guerre sociale de l'UE et des gouvernements de la troïka
A bas les coupes budgétaires et les réformes du code du travail !Pas un euro de plus pour les banquiers !
Aucun paiement de la dette publique aux banquiers !
Pour un plan de sauvetage des travailleurs et du peuple !
Pour une réponse européenne unifiée à la guerre sociale !
Les gouvernements européens ont déclaré une guerre sociale ouverte aux travailleurs, aux jeunes et aux secteurs populaires de tout le continent, afin d'imposer un recul historique.
Cette guerre sociale se concentre avec une particulière virulence dans la périphérie de la zone euro (Grèce, Portugal, Irlande, Espagne et Italie) et implique pleinement l'UE et l'euro, les instruments politiques et économiques développés par l'impérialisme européen au service des banques et des grandes entreprises.Cette guerre sociale est la réponse du capitalisme européen à la crise capitaliste qui a débuté en 2007, une crise qui ne peut être comparée qu’à la Grande Dépression, et qui a aujourd'hui son épicentre en Europe.
La politique de l'UE exprime la nécessité pour les impérialismes centraux (allemand et français) de faire peser le poids de la crise sur la périphérie européenne, afin d’empêcher qu’elle n’atteigne pleinement le centre, en menaçant frontalement ses intérêts et en poussant l'économie mondiale dans l'abîme. La politique de l'UE est également un instrument essentiel pour consolider l'hégémonie de la bourgeoisie allemande sur l’Europe. Les plans de pillage qui s’abattent aujourd’hui sur la Grèce sont les développements d’un drame qui se propage dans toute la périphérie européenne.
La réponse des travailleurs et des secteurs populaires aux coupes budgétaires et aux contre-réformes se font sentir dans toute la périphérie. Avec le peuple et la classe ouvrière grec comme avant-garde incontestable, les grèves et les manifestations ont gagné les rues du Portugal, de l'Italie et de l'Etat espagnol, dans une vague européenne qui comprend les pays de l'Est (Roumanie), ainsi que la Grande-Bretagne et Belgique.
Dans cette situation critique, nous, les sections de la LIT-QI (Ligue Internationale des Travailleurs – Quatrième Internationale), réunies à Lisbonne à l'occasion du Congrès du MAS (Mouvement pour une Alternative Socialiste), nous adressons fraternellement à l’avant-garde militante européenne afin de présenter nos vues sur la crise actuelle et les alternatives qu’elle appelle.
L'Union Européenne et l'euro : armes de guerre contre les travailleurs et les peuples
La constitution de l'Union européenne et la création postérieure de l'euro sont le point culminant d'une longue évolution datant de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elles exprimaient alors la nécessité pour les impérialismes européens centraux de disposer des instruments leur permettant d'atteindre deux objectifs. Le premier consiste à mettre en œuvre un plan unifié pour balayer les conquêtes obtenues par la classe ouvrière européenne dans la période d'après-guerre, et de faire ainsi du continent « la région la plus compétitive du monde ». Le deuxième objectif, inséparable de ce qui précède, consiste à présenter un front uni pour disputer à l'impérialisme américain sa part du butin dans le pillage du monde, tout en faisant face aux « pays émergents ». L'UE, dont le cœur est la zone euro, n'était cependant pas un Etat unifié, mais un bloc impérialiste régionale de différents Etats, avec le capitalisme allemand et français comme centre névralgique (associés à l'ancienne puissance britannique, avec ses intérêts spécifiques autour de la City et de sa « relation particulière » avec les Etats-Unis). Autour de ce noyau sont regroupés des impérialismes de deuxième et troisième ordre, comme l'Italie, l'Espagne, le Portugal ou la Grèce, et dans une seconde couronne, les pays de l'Est « annexés » après le processus d'élargissement et soumis depuis longtemps déjà à un processus de recolonisation, essentiellement par le capitalisme allemand.L'euro a été, depuis sa création, un instrument fondamental pour établir l'hégémonie allemande sur l'Europe. Il a servi à affirmer la prépondérance, en premier lieu, de l'industrie allemande, dont les exportations vers la périphérie se sont multipliées, en parallèle à la désindustrialisation de cette dernière, dont les grands déficits commerciaux étaient largement financés par les excédents de capital des banques allemandes et françaises, qui n'ont pas hésité un seul instant à alimenter généreusement les processus spéculatifs, telle l’énorme bulle immobilière espagnole.
Alors que ce processus se déroulait, submergeant la périphérie dans un océan de dettes, ses banques et son secteur financier – dépendants du financement allemand et français – ont atteint des bénéfices records, tout en affirmant leur domination sur des secteurs telles la construction et l'énergie, qui ne représentaient de risque pour l’exportation allemande. Cette bourgeoisie parasitaire de la périphérie est ainsi devenue bénéficiaire et agent de la soumission aux impérialismes centraux.
L'endettement des économies européennes, et en particulier de la périphérie, a grandement augmenté avec l'introduction de l'euro en 2000. Il faisait partie du processus global d’endettement privé et de spéculation, qui se développait alors à l’échelle mondiale, avec comme épicentre le système financier américain (subprimes). Lorsque la vague d’endettement global n’a plus été suffisante pour prolonger la crise de surproduction et que la crise capitaliste a finalement éclaté en 2008, les Etats sont intervenus en masse pour sauver les banquiers et les grands capitalistes, initiant alors la plus grande guerre sociale contre la classe ouvrière et les secteurs populaires depuis les années ‘30. En Europe, la dette privée des banques ayant été convertie en dette publique et la périphérie étant fragilisée et massivement endettée, la crise capitaliste a pris, à partir de 2010, la forme d’une crise de la dette publique. La crise de la dette publique est ainsi devenue la grande justification de la guerre sociale et l'instrument privilégié du capital financier pour se réapproprier la richesse au détriment de l'appauvrissement massif des peuples. C’est dans le même temps l'arme pour soumettre les pays de la périphérie aux capitalismes centraux, en particulier l'allemand.
Dette publique, coupes budgétaires, contre-réformes et néocolonisation
Les réductions criminelles des budgets publics mènent au démantèlement et à la privatisation des services publics de base en santé, éducation, système de pensions, ainsi qu’à l’augmentation vertigineuse de la pauvreté, alors même que le chômage (poussé par la récession que les plans d'austérité accentuent) augmente fortement, affectant des millions de ménages. Les coupes budgétaires dans les services publics avancent conjointement aux plans de privatisation des dernières propriétés étatiques qui étaient encore dans les mains du secteur public. Et viennent enfin comme partie intégrante de ce package les contre-réformes du droit du travail qui en Grèce, dans l’Etat espagnol, au Portugal ou en Italie, sont en train de liquider la négociation collective et de livrer les travailleurs à l'arbitraire patronal, donnant toutes les facilités pour licencier à des coûts ridicules, ainsi que les moyens pour appliquer une réduction générale des salaires.L’issue bourgeoise à la crise capitaliste implique l’augmentation brutale de l'exploitation, en particulier de la périphérie de la zone euro, orientant la plus-value réalisée vers les banques françaises et allemandes. Les banques et grandes entreprises des pays de la périphérie participent alors de ce festin macabre comme complices et partenaires de seconde zone. Mais imposer aux pays de la périphérie le payement de la dette exige leur contrôle politique. Ce processus, élément constitutif de l'offensive capitaliste, s’est approfondi depuis le déclenchement de la crise de la dette. En fait, et c'est ce qui est déjà évident en Grèce, ces pays vivent la dégradation de leur statut national : de partenaire de seconde zone des impérialismes centraux à la condition de néocolonie. Ce mouvement, qui présente des rythmes inégaux selon les pays, affecte toute la périphérie et est inséparable des processus bonapartisation du régime politique dans lequel les gouvernements sont soumis directement à l'Union européenne, et ont tendance à devenir autonome des majorités parlementaires et à s’appuyer de plus en plus sur l'appareil coercitif de l'Etat, l'extension des mesures de répression et de restriction des droits démocratiques.
Le pillage de la périphérie est inséparable des outils que la bourgeoisie européenne utilise pour le mener à bien, soit l'Union européenne et l'euro. Ce dernier est aujourd’hui reconfiguré autour de « l’Union fiscale », votée à la demande d'Angela Merkel et qui détruit purement et simplement la souveraineté budgétaire des Etats de la périphérie.[1]
Le projet de l'euro n’est pas mis en question par les impérialismes centraux, même si la Grèce ou le Portugal finissent par en être exclus. L'euro a été une étape importante dans l'établissement de l'hégémonie allemande sur l'Europe et continue d'être la pièce clef pour la garantir, ainsi que pour rivaliser avec les Etats-Unis et le Japon.
La bourgeoisie de la périphérie, dominée par la finance, n'a aucun scrupule à collaborer au processus de soumission de leurs pays aux diktats du capitalisme allemand et français, de manière à pouvoir ainsi participer au pillage du monde par le capital impérialiste. Ce sont les charognards des grands prédateurs.
Nous sommes à l'aube d'un long processus historique de déclin des bourgeoisies de la périphérie européenne. L'UE et la monnaie unique ont donné l’illusion d’un retour possible à leur passé colonial et impérialiste, tandis que les emprunts semblaient être la carte d’entrée dans le club des grands. Mais la crise a brutalement mis fin aux illusions. Les bourgeoisies de la périphérie européenne n'ont déjà plus de marge de manœuvre. Leur dette est devenue leur principal problème et leur seule option est d’imposer un recul historique aux acquis sociaux. Aujourd’hui, s’ils veulent continuer en tant que partenaires de seconde zone des impérialismes centraux, même à un rythme différent, ils doivent livrer leur pays et veiller à ce qu'une plus grande part de la richesse nationale aille dans les mains des banques allemandes et françaises. C'est le prix à payer pour rester dans le club. C’est pour cela qu’il n'ya pas de lutte possible contre l'impérialisme allemand sans intégrer la lutte contre la bourgeoisie de la périphérie de l'Europe.
Pour les travailleurs, les secteurs populaires et les jeunes de la périphérie, il n'y a aucune perspective d'avenir au sein l'UE et l'euro. Les gouvernements au service du secteur bancaire et de l'UE, qu’ils soient de la droite ou de la social-démocratie, disent qu’il « n'ya pas d'avenir en dehors de l'UE » et que « sortir de l'euro, c'est le chaos ». Mais le « chaos », c'est le chômage de millions de foyers, les licenciements et les fermetures d'entreprises ; ce n’est pas atteindre la fin du mois, avec des salaires et des pensions misérables ; ce sont des écoles non chauffées avec des enseignants au salaire réduit et de plus en plus précarisés ; c’est la détérioration générale de la santé publique ou le fait d'avoir à payer pour être soigné dans un hôpital. Ainsi, de la même manière que rester dans l'UE et l'euro est une nécessité de la bourgeoisie décadente de la périphérie, pour la grande majorité cela signifie l’appauvrissement et la ruine sociale.
Ils essaient de faire payer aux travailleurs et aux secteurs populaires le fait de rester dans l'euro et l'UE au prix d'immenses souffrances. Et pourtant, d'importants secteurs du patronat et du gouvernement allemand se disent clairement en faveur de la sortie de la monnaie unique de la Grèce et du Portugal. Leur problème ne serait en fait que de savoir quand et comment. Ils ne le veulent pas avant d’avoir terminé le pillage, mais surtout, ils doivent le faire de manière « ordonnée » et contrôlée. Ils ne peuvent se permettre une contagion de l'Italie ou de l'Etat espagnol qui ferait exploser la zone euro, provoquant un tsunami financier de portée européenne et mondiale.
L’époque de l’Etat providence est terminée
Nous ne sommes pas simplement face à un changement de plus. Il s’agit d’un processus de changement qualitatif dans les relations entre les classes au sein de chaque pays, et de changement des relations des pays européens entre eux. Un changement dans lequel la dette publique, les coupes budgétaires, les contre-réformes et la néocolonisation de la périphérie forment la base à partir de laquelle les impérialismes européens centraux veulent assurer leur hégémonie et poser les fondations leur permettant de rivaliser avec l'impérialisme américain.Il n'y a pas scénario de retour à la situation précédant la crise. Quelle que soit l'issue du processus en cours, ça en est fini de l'Etat-providence, tout comme l'UE a été achevée avant la crise. Aujourd’hui une part importante de la richesse nationale de la périphérie ne peut plus être redistribuée et doit être expatriée au profit des impérialismes centraux. Il ne sera plus possible de maintenir la paix intérieure entre les classes avec l'aide des dépenses publiques qui distribuaient des salaires indirects (éducation, santé, retraites) à la majorité de la population. Dans ce contexte, les victoires partielles des travailleurs ne vont plus être en mesure de donner lieu à des gains stables et ne peuvent être qu'un prélude à des batailles plus sanglantes. Le résultat final sera soit une défaite historique de la classe ouvrière européenne dans le cadre d'une Union européenne sous hégémonie de l’impérialisme allemand, soit la rupture avec l'UE et l'euro, et l'ouverture d'une voie révolutionnaire internationaliste.
La social-démocratie et les bureaucraties syndicales
Pour avancer dans la lutte pour le maintien de leurs gains et affronter les gouvernements, les travailleurs ont un obstacle majeur auquel ils doivent faire face : les partis sociaux-démocrates grecs, espagnols, portugais ou italiens. Lorsque ceux-ci sont au gouvernement, ils n'ont pas hésité à mettre en œuvre les plans de l’UE et des banquiers et, plus tard, arrivés à l’opposition, font front commun et ne s’opposent pas vraiment aux gouvernements de droite ou « technocratiques » qui les ont remplacés et qui sont maintenant responsables de l'application des plans de pillage et d'appauvrissement.Un défi majeur auquel nous devons faire face consiste à surmonter l'obstacle énorme imposé par les bureaucraties syndicales. Alors que la férocité des attaques requiert une réponse générale et unifiée dans chaque pays, dans la périphérie et à l’échelle européenne, ces bureaucraties, organisées au sein de la Confédération Européenne des Syndicats (CES), se limitent à négocier, pays par pays, l'intensité des attaques. Elles convoquent des manifestations qui ne remettent pas en cause les gouvernements, et ne mettent pas à l’ordre du jour l’objectif de vaincre les réformes du travail et de mettre un terme à « l'austérité ». En fait, elles n'ont jamais remis en question le paiement de la dette publique aux banques, ni même la politique d'austérité en tant que telle, sans parler de l'adhésion à l'euro et à l'UE, qu’elles continuent à défendre actuellement. Leur opposition se borne à demander que les réductions budgétaires soient plus lisses et à demander une réforme fiscale. Leur véritable préoccupation est de négocier la conservation de leurs propres privilèges, désormais directement attaqués ou, en tout cas, diminués et menacés par les réformes et les coupes budgétaires.
En ce moment, nos pays sont en train de vivre un processus complexe, riche et inégal de réorganisation en opposition à la bureaucratie syndicale. Ce processus s’exprime dans certains cas par la formation de syndicats alternatifs, dans d'autres cas, par la création d'opposition syndicale, et dans le cas de la Grèce, par des comités élus et des mouvements de coordination de base. Le développement de ce processus exige non seulement de rompre avec les vieux appareils bureaucratiques en effritement, mais également d’unifier tout ce mouvement d'opposition à la bureaucratie sous la bannière de l'indépendance de classe et de la démocratie ouvrière, en surmontant le sectarisme d’appareil et en se dirigeant vers la construction d'un syndicalisme combatif de masse qui se poserait comme alternative au contrôle des bureaucraties. Cette lutte va demander une combinaison adéquate de dénonciation de la bureaucratie syndicale et d’exigence, face aux travailleurs, qu’elle assume sa responsabilité dans la lutte.
Le refus par la bureaucratie syndicale de convoquer de manière urgente des journées unitaires de grève et de lutte à l’échelle de la périphérie de l'euro et de l'Europe est injustifiable. Il n’est pas possible de comprendre comment, aujourd'hui même, peuvent être appelées deux grèves générales, l'une au Portugal et un l’autre dans l'Etat espagnol, avec une semaine d'intervalle. La principale force de nos ennemis, c'est précisément notre division entre pays, qui sont toutefois unis et disciplinés par l'UE. Nous ne pouvons pas vaincre leurs plans sans unir nos forces au niveau international, tout comme il n'y a pas de « solutions nationales » à la crise. Par conséquent, il est essentiel d'accompagner ce mouvement avec des mesures efficaces dans la coordination du syndicalisme européen combatif.
La gauche européenne et le programme pour affronter la crise
L’actuel carrefour de l'histoire européenne met également à l’épreuve les organisations politiques de gauche. Les « europhiles », comme le Bloco de Esquerda (Bloc de Gauche) au Portugal, n'envisagent pas d’autre option que le maintien du paiement de la dette aux banquiers, une fois idéalement, « restructurée ». Selon Louçã, le principal dirigeant du Bloc, il est indiscutable qu’il faille rester dans la zone euro et l'UE, et sur cette base négocier l’intensité de l'austérité. Cette position coïncide avec celle du PC portugais, qui dirige la bureaucratie syndicale de la CGTP (Confédération Genérale des Travailleurs Portugais). Mais le continent sur lequel Louçã semble vivre n'existe que dans ses rêves. L’Europe réelle, l'Union européenne, n’accepte aucune négociation sur la question de l’Etat-providence dans la périphérie. Cette politique du Bloco et du PCP (Parti Communiste Portugais) maintient les travailleurs liés à leur bourgeoisie et à l'UE, et n’admet aucune solution de rechange face à l'appauvrissement et la spoliation. Une politique similaire est défendue en Grèce par Syriza,[2] qui soutient également qu’il faut « restructurer la dette », c'est-à-dire la réduire, la dévaloriser et l'étendre... afin de continuer à la payer.Ces partis refusent de défendre le non-paiement de la dette, et rejettent également d’appeler à la suspension immédiate du paiement de la dette publique. Ils sont en effet conscients que cela pourrait mener à la sortie l'euro et à la rupture avec l'Union européenne, ce qui, de leur point de vue, équivaut à la ruine complète du pays. Mais c'est une politique aveugle et suicidaire, qui fait le jeu de l'impérialisme allemand et français. Parce que tout le monde sait que les dettes grecques ou portugaises sont tout simplement impayables, et que l'UE ne cherche qu’à piller ces pays. Alors que la Grèce et le Portugal sombrent rapidement, ces partis se consacrent à alerter du naufrage, et à proposer comme solution le diamètre le plus commode de la corde qui est en train de pendre les travailleurs et les secteurs populaires.
Le parti de la Refondation Communiste (Refundazione Communista) se limite à une critique chauviniste du gouvernement Monti pour avoir « cédé la souveraineté à l'Allemagne », alors que Monti représente également l'impérialisme italien, nécessaire complice d’Angela Merkel. L'intention des dirigeants de Refundazione est de retourner pour la troisième fois au gouvernement italien, avec le soutien du même impérialisme italien qui aujourd’hui appuie Monti.
En ce qui concerne le NPA français, son candidat à la présidence, Philippe Poutou, a déclaré : « Nous croyons que la seule façon de mettre fin aux impératifs de la rentabilité et de la compétitivité [de l’UE] est la construction d'une Europe des peuples. La vraie question n'est pas de savoir si nous sommes ‘pour’ ou ‘contre’ l’Europe ».[3] Mais ce n'est pas la peine tricher. Le problème n'est pas de savoir si nous sommes ‘pour’ ou ‘contre’ l'Europe en général, mais plutôt de l’Europe particulière et concrète qui existe aujourd'hui, l'Europe impérialiste qu’est l'Union européenne, un instrument d'oppression et de colonisation des peuples de l'Europe au service des impérialismes centraux.
Nous ne pouvons pas dire aux travailleurs grecs, portugais, italiens et ceux de l’Etat espagnol que ce qu’il manque c’est « une rupture économique et sociale avec le système capitaliste » en général, en ignorant le véritable problème du pillage de leurs pays par l'UE et l'euro. Nous ne pouvons pas parler sérieusement de politique anti-capitaliste si nous évitons la confrontation avec la forme concrète avec laquelle la bourgeoisie européenne attaque la classe ouvrière et les peuples d’Europe.
Le programme de Philipe Poutou est celui du NPA et du Secrétariat Unifié : « En Europe, la réponse à la crise n'est pas le protectionnisme, le nationalisme et la sortie de l'euro. Cela conduirait à une concurrence accrue entre les pays européens et à de nouvelles attaques contre les peuples (...) pour ne pas mentionner le développement de mouvements chauvinistes et xénophobes. La réponse nécessaire est une Europe sociale, démocratique et écologiste, qui rompt avec les politiques et les institutions européennes ».[4]
Bien sûr, nous ne pouvons qu’être d’accord avec le rejet du protectionnisme nationaliste, mais nous n’acceptons pas, à nouveau, de mentir aux travailleurs. Parce que ce que défend en réalité le NPA et le SU, c'est qu'il n'y a pas d'autre alternative à la rupture avec l'euro et l'UE que le protectionnisme nationaliste bourgeois. Et ce n'est pas vrai. C'est en effet le dilemme de la bourgeoisie européenne, et en particulier celle dans la périphérie, mais celui de la classe ouvrière et de la gauche. La bourgeoisie et les gouvernements de la périphérie brandissent tous les jours la menace de la sortie de l'euro comme la plongée de leur pays respectif dans l'abîme. Mais la seule certitude est précisément inverse : les plans qui assurent la persistance des pays de la périphérie dans la zone euro et l'UE n'impliquent que l'appauvrissement et la ruine sociale aux travailleurs et aux secteurs populaires.
Poutou défend l'idée que les mesures nécessaires pour s'assurer que les travailleurs ne paient pas pour la crise du capital sont celles qui ouvrent la voie à « une rupture économique et sociale avec le système capitaliste », mais cela signifie rompre avec l'UE et l'euro, oui, en vertu d'un internationaliste à l'Europe du capital.
Le NPA, avec cette politique, abandonne à l’extrême droite du Front National la bannière de la rupture avec l'euro et l'UE, ne voyant pas plus de deux options : soit rester dans l'euro et l'UE (en le justifiant par une rhétorique de plus en plus creuse au sujet d’un prétendu processus constitutionnel qui réformerait certaines institutions irréformables et harmoniserait socialement l'UE par le bas), soit ouvrir la voie au Front national et sa politique xénophobe. Mais le NPA ne tient pas compte des autres alternatives, en réalité la seule option qui puisse fournir une issue favorable à la crise historique du capitalisme européen. C’est-à-dire rompre avec l'euro et l'UE, démolir le monstre antidémocratique et antisocial du capital financier qu’est l'UE, et lever la bannière de la solidarité internationale et de la lutte pour une nouvelle Europe, celle des travailleurs et des peuples, les Etats-Unis socialistes d'Europe.
Un programme pour faire face à la catastrophe
La solution pour arrêter la catastrophe qui ravage la Grèce et s’abat sur la classe ouvrière, la jeunesse et les classes moyennes des pays de la périphérie n'est possible que par la rupture avec le pillage des ces pays et en unissant nos forces. La lutte immédiate consiste, bien entendu, à mettre un terme aux coupes budgétaires, à la réforme des retraites et du travail, en étant conscients que cela implique d'unifier les luttes dans chaque pays et à apporter une réponse commune dans toute la périphérie européenne.
Mais arrêter la saignée exige une mesure indispensable et impérative : le non-paiement de la dette aux banquiers et aux fonds spéculatifs. Aucun euro des budgets publics ne doit revenir aux banquiers, mais doit servir à répondre aux besoins sociaux ! Il est urgent d’unir toutes les forces prêtes à se battre pour cela dans chaque pays, et de se coordonner à travers toute la périphérie européenne, afin de faire de cette exigence un grand mouvement de masse.
Les commentateurs au solde du capital agitent dans les médias que cette mesure conduirait à un effondrement catastrophique des banques, et dans leur sillage de l'économie tout entière. Mais à cela il y a réponse simple : il suffit de nationaliser les banques (en expropriant les grands actionnaires et les investisseurs), et de les unifier sous le contrôle des travailleurs et des organisations populaires, sauvegardant les dépôts des petits épargnants et mettant le crédit à disposition afin de réorganiser l'économie au profit de l’immense majorité.
Il n'y a pas moyen de concilier les besoins essentiels des travailleurs et du peuple et le « sauvetage » des banques. Toute action sérieuse pour sauver la population active va se heurter directement avec les besoins vitaux des bourgeoisies de la périphérie et des impérialismes centraux. Si ce dont il s’agit est de sauver les travailleurs, alors la sortie de l'euro et la rupture avec l'UE apparaissent comme une nécessité politique.
Nous savons que le pays qui prendra cette voie va faire face à un boycott impitoyable dans le but de le couler. Par conséquent, comme mesures d'autodéfense de base et comme un moyen nécessaire pour organiser adéquatement son économie, il s’agira d'établir un monopole d'Etat sur le commerce extérieur et le plein contrôle des mouvements de devises, de nationaliser les entreprises stratégiques, et de les mettre sous contrôle des travailleurs. De même, pour assurer du travail pour tous et mettre fin à la précarité de l’emploi, il conviendra de répartir la charge de travail entre tous (échelle mobile des heures de travail), de mettre en œuvre un vaste plan de travaux publics, et de réorganiser l'industrie et les services.
La crise grecque, à la tête des crises de la périphérie, démontre que la seule classe qui peut empêcher la faillite du pays, faire cesser la profonde dérive antidémocratique et empêcher le pillage du pays, c'est la classe ouvrière. Mais cela nécessite d’en finir avec le gouvernement fantoche de l'UE et de le remplacer par un gouvernement des travailleurs et du peuple, soutenu par les organisations qui soutiennent la mobilisation dans les entreprises et dans les rues. Seul un tel gouvernement sera en mesure de prendre les mesures nécessaires que nous avons proposées.
Ceci n'est pas, en outre, une alternative limitée à la Grèce. La lutte et le triomphe dans un pays, dans une perspective historique, ne sont qu'une solution temporaire, car sans la solidarité internationaliste des travailleurs du continent et du monde, tout mouvement révolutionnaire est voué à l'échec. D'autre part (par opposition à ce qu'annonce le KKE – Parti communiste grec), il n’y aucune possibilité matérielle de construire le socialisme si nous ne le faisons pas à l’échelle européenne, et même au-delà, à l’échelle mondiale. D'où la nécessité vitale de récupérer la perspective de la lutte pour les Etats-Unis Socialistes d'Europe, en reprenant la bannière de la Troisième Internationale, avant que celle-ci ne soit tombée sous les bottes de Staline.
C'est l'engagement des organisations européennes de la Ligue Internationale des Travailleurs (LIT-QI), c’est la lutte que nous souhaite mener ensemble, côte à côte avec les militants et les activistes. Cela signifie que nous appelons les travailleurs, la jeunesse et le peuple à lutter pour une issue ouvrière à la crise, ce qui exige de poser la question du pouvoir pour la classe ouvrière. C'est dans cette lutte que nous voulons construire nos organisations et reconstruire l’Internationale révolutionnaire dont nous avons besoin autant que de l'air nous respirons.
Mars 2012
Coordination européenne de la LIT-QI
[1] a) Il y aura des sanctions automatiques pour tous les pays qui dépasseront la limite définie de déficit public ; b) la Cour de Justice des Communautés Européennes pourra infliger une amende aux Etats qui n’approuvent les lois garantissant le pacte budgétaire ; c) l'Eurogroupe (conseil composé par les ministres de l'Economie) aura le dernier mot sur les budgets des Etats, qui avant d’être présentés aux parlements, seront passés au crible par l'Allemagne ; d) la Commission Européenne dictera les lignes de la politique économique des gouvernements.
[2] SYRIZA (« Coalition de la gauche radicale ») un front électoral lancé en 2004 et composé de diverses organisations de la gauche grecque et de personnalités politiques. La principale organisation est Synaspismos (SYN - Coalition de la Gauche, des Mouvements et de l'Ecologie). Syriza a neuf députés au parlement.
[3] http ://poutou2012.org/L-Europe-fragilise-t-elle-ou
[4] Rapport adopté par le Comité International du Secrétariat Unifié. 22 février 2011. Nous soulignons.