logo-IV-LCT.jpg

Ligue Communiste des Travailleurs

Section belge de la Ligue Internationale des Travailleurs -
Quatrième Internationale (LIT-QI)

« L'émancipation des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs eux-mêmes. » K. Marx

Newsletter

13 juillet 2015
Secrétariat International de la LIT-QI

Le peuple grec a dit NON...
Mais Tsipras et le gouvernement de Syriza
ont dit OUI

« Ça, ce n'est pas ce que nous avons voté, non, » disait Anna, une employée de banque. « Les gens sont très déçus. Ce sont les mêmes mesures que celles d'avant le Référendum, » disait Panayiota, qui gère le café du quartier.


   La déception ressentie par ces deux travailleurs grecs – et, certainement, aussi par les millions de gens, en Grèce et dans le monde, qui ont, comme nous, soutenu le Non au Référendum et ont célébré son triomphe – est plus que justifiée. Après cette grande victoire, qui a montré la force du peuple grec et sa volonté de faire face à la Troïka (FMI, UE et BCE) et à ses diktats, le gouvernement de Syriza a capitulé à nouveau, présentant une proposition qui est essentiellement la même que celle qui avait été largement rejetée par le vote de dimanche 5 juillet.
   Pour définir la position de Syriza, il n'y a pas d'autre mot que « trahison » : trahison aux aspirations de ceux qui l'ont conduit au gouvernement (comme expression déformée de la lutte épuisante des années précédentes) ; trahison au résultat du récent vote. Ce fut une « trahison annoncée », car le plébiscite à peine terminé, Alexis Tsipras le considérait déjà, non comme un mandat populaire de lutte et de rupture, mais comme une base pour « négocier de meilleures conditions ».
   Il n'a cependant même pas négocié de « meilleures conditions ». Il a capitulé sur toute la ligne, en acceptant les exigences centrales de la Troïka, telles que le maintien de la dette extérieure à sa valeur actuelle (sans aucune annulation ni allègement), la modification du système des retraites, l'augmentation de la taxe sur le tourisme et la poursuite des privatisations.
   Qui plus est, en échange d'un refinancement purement comptable de la dette pour trois ans – un refinancement dont profitent les pays et les banques créanciers, étant donné qu'aucun euro n'entrera réellement dans le pays –, Syriza accepte que la Troïka assume la direction réelle de l'économie du pays, ce qui était déjà le cas à l'époque des gouvernements du PASOK et de Nouvelle Démocratie. Ce n'est pas par hasard que les députés de ces partis ont soutenu la proposition du gouvernement au Parlement.
   Le gouvernement de Tsipras a hypothéqué presque tout son mandat et l'a subordonné au bon plaisir de la Troïka. De cette façon, il a décidé de devenir (tout comme ses prédécesseurs) l'administrateur colonial infaillible du pays, et il se prépare à attaquer de plus en plus les travailleurs et le peuple grecs, comme il l'avait déjà fait en confisquant l'argent des hôpitaux et des municipalités pour payer la dette extérieure. Une triste fin pour celui qui a créé tant d'espoirs de changement.

Les raisons de la trahison

Nous regrettons cette trahison du gouvernement Syriza envers les travailleurs et le peuple grecs. Mais elle ne nous surprend pas : dans de nombreux articles et déclarations, nous avons mis en garde contre ce développement plus que probable. Dans notre déclaration du 12 mai dernier par exemple, nous avancions :
   Pour comprendre le pourquoi de la politique de Syriza, il faut partir de quelques définitions principales. La première concerne le caractère de classe de l’actuel gouvernement, un caractère qui, selon le marxisme, ne doit pas être défini par l’idéologie ou l’origine de classe de ses membres, mais par le caractère de classe de l’Etat qu’il administre et défend. En accord avec ce critère, le caractère de classe du gouvernement de Syriza est, sans aucun doute, celui d’un gouvernement bourgeois qui n’a aucune intention de changer l’Etat capitaliste de la Grèce. [...]
   Il s'agit d’un gouvernement bourgeois « atypique » que nous appelons de Front populaire, c'est-à-dire, un gouvernement dans lequel le rôle principal est assumé par des organisations ouvrières ou petites bourgeoises de gauche, dirigeantes du mouvement de masse, qui gouvernent conjointement avec des secteurs minoritaires de la bourgeoisie. En fait, le gouvernement de Syriza n’a rien d'une nouveauté historique : c’est l’actualisation de vieilles formules de gouvernements de collaboration de classes, souvent utilisées dans le passé, surtout en période de grande montée du mouvement de masses, pour essayer de garder le cap dans cette situation et de faire chavirer cette montée. A ceci près que la place occupée dans les gouvernements autres fois par les partis sociaux-démocrates ou les vieux partis communistes est occupée actuellement par de nouvelles formations comme Syriza (ou ceux qui aspirent à ce rôle, comme Podemos en Espagne). [...]
   La deuxième définition est le fait que la Grèce est un pays semi-colonial. C'est-à-dire un pays avec des pactes politiques et économiques qui le subordonnent à l’impérialisme, tels que ceux qui se manifestent dans le caractère de son appartenance à l’Union européenne et à la zone euro (ce qui a eu pour effet, par exemple, la destruction de sa principale industrie : les chantiers navals) ; ou dans les mécanismes de la dette externe et ses conséquences (les sacrifices pour la payer et la supervision permanente de sa politique économique). En ce qui concerne cette subordination à l’impérialisme, la situation de la Grèce est similaire à celle des pays latino-américains. [...]
   Face à l'alternative incontournable, de répondre aux aspirations du peuple grec ou de capituler à la Troïka, le gouvernement de Syriza a opté pour la capitulation ; ce qui prouve, une fois de plus, que tout gouvernement qui ne rompt pas avec la bourgeoisie et l’impérialisme termine – tôt ou tard – par devenir le jouet du capital financier.

Que faire maintenant ?

Beaucoup de travailleurs grecs qui ont fait confiance au gouvernement de Syriza et Tsipras sont déçus. Cette déception ne doit toutefois pas mener à la paralysie, mais bien à la reprise du chemin de la dure lutte menée en son temps contre les gouvernements du PASOK et de Nouvelle Démocratie, une lutte dont la conviction fut confirmée lors du vote de dimanche 5 juillet.
   A tous les travailleurs et au peuple grec, nous disons qu'il n'y a pas d'autre chemin que celui de leur mobilisation et de leur lutte, avec indépendance par rapport au gouvernement. Il faut une grève générale en défense des revendications de base des travailleurs et contre les plans d'austérité négociés par le gouvernement de Tsipras avec l'impérialisme.
   Il faut construire des organisations de front unique qui peuvent lutter contre les plans de la Troïka et contre toutes les mesures d'austérité, dans la rue et dans les lieux de travail. De cette façon vont se construire les bases pour un véritable gouvernement de la classe ouvrière, soutenu dans la mobilisation des travailleurs et du peuple, avec le soutien international. Telle est la seule façon de mettre en échec l'agression impérialiste, et de construire une issue ouvrière pour la Grèce et pour l'Europe. Les travailleurs grecs doivent préparer dès maintenant la mobilisation contre tout plan possible et contre toute mesure d'austérité que le gouvernement Syriza-ANEL (soutenu maintenant par le PASOK et Nouvelle Démocratie) devra appliquer pour honorer son engagement envers l'UE et la Troïka.
   Ceux qui se sont opposés à la signature du nouvel accord (et ont voté contre cette proposition au Parlement) au sein de Syriza – tels que la plate-forme de gauche DEA – ne peuvent pas continuer à entretenir des illusions dans ce gouvernement : il est urgent de rompre sans tarder avec lui, d'organiser l'opposition ouvrière et populaire (ensemble avec d'autres organisations de gauche qui ne font pas partie du gouvernement) et de construire le front unique des travailleurs, avec indépendance par rapport au gouvernement et afin de le combattre.
   Et il faut, plus que jamais, appeler à la solidarité des travailleurs et des peuples de l'Europe dans cette lutte, soulevant la bannière d'une Europe unie des travailleurs et des peuples, opposée à l'UE de l'impérialisme et des bourgeoisies nationales serviles.

Non, c'est Non !
Suspension immédiate du paiement de la dette extérieure !
NON à tout plan ou mesure d'austérité !
La Troïka hors de la Grèce !
Pour la nationalisation immédiate des banques !
Non au pacte de Syriza-PASOK-ND !
Pour un plan de sauvetage des travailleurs et du peuple !
Pour un gouvernement des travailleurs et du peuple !
Pour l'unité de la classe ouvrière européenne
pour faire face aux plans d'austérité !