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Ligue Communiste des Travailleurs

Section belge de la Ligue Internationale des Travailleurs -
Quatrième Internationale (LIT-QI)

« L'émancipation des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs eux-mêmes. » K. Marx

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21 novembre 2012
Ana Pagamunici*

Le machisme, c'est quoi ?

Selon le dictionnaire Michaelis, le machisme est « un comportement de ceux qui n'acceptent pas l'égalité de droits entre les hommes et les femmes ». En politique, la définition du machisme est un peu plus complexe. Pour nous, le machisme est une idéologie créée par la société de classes pour maintenir la propriété privée, au service de la domination et aussi de l'exploitation.

Une forme d'oppression

Nous utilisons le mot oppression pour toute conduite ou action visant à transformer les différences en inégalités, afin d'utiliser celles-ci au profit d'un groupe particulier contre un autre. Quand il s'agit de Noirs et de Blancs, nous l'appelons racisme ; quand il s'agit d'hommes et de femmes, nous l'appelons machisme.
   L'oppression se manifeste de plusieurs manières, que ce soit par des propos qui ridiculisent les femmes pour leur condition de femme (« Quelle façon de conduire une voiture : ce ne peut être qu'une femme ! ») ; par l'écart salarial entre les hommes et les femmes (aujourd'hui, au Brésil, une femme gagne 30 % de moins qu'un homme) ; par l'agression physique, verbale ou psychologique (au Brésil, toutes les deux minutes, cinq femmes sont battues).

Une idéologie

Mais le machisme n'est pas seulement le résultat d'un comportement individuel. C'est une idéologie, c'est-à-dire un système d'idées fausses qui créent une fausse vérité que le système utilise pour maintenir la domination et étendre l'exploitation. L'idée principale est que les femmes sont inférieures aux hommes et ne peuvent donc pas assumer certaines tâches ou avoir certains comportements.
   C'est grâce à cette idéologie que l'on considère comme « normal » le fait que les femmes soient les « reines du foyer » et qu'elles doivent prendre soin des enfants, de la maison et des maris sans aucune rétribution. Cette idéologie est transmise par l'école, les familles, les églises, les médias et toutes les institutions qui reproduisent le système capitaliste. En réaffirmant cela encore et encore, cela devient naturel, allant de soi, éternel.
   Dans le cas d'Eliza Samúdio, qui avait eu une relation avec le gardien de but Bruno (en prison suite à l'accusation de l'avoir tuée), l'assistante qui l'a aidée lors d'une de ses premières dénonciations de menaces de mort, n'a pas encadré le cas dans la Loi Maria Penha [de 2006, concernant la violence domestique], affirmant que la loi avait été faite pour « défendre la famille ». Comme Eliza ne rentrait pas dans les normes (étant une « gonzesse de footballeur »), il s'agissait de violence commune. Ceci est un bon exemple de la façon dont l'idéologie est utilisée et reproduite.

Une création de la société de classes

L'oppression (le machisme) n'a pas toujours existé. Il a été créé pour justifier la division de la société en classes. Dans les sociétés communistes primitives, les femmes s'occupaient des tâches ménagères et participaient à la production sociale, ensemble avec les hommes
   Avec l'émergence de la société de classes, l'institution de la propriété privée et le besoin d'accumulation et d'héritage, il fallait diviser les familles et établir la monogamie pour préserver la propriété privée. Avec cela, les femmes ont été écartées de l'espace public, de la production et de la survivance, et reléguées à l'espace domestique. Ainsi, il leur était interdit de travailler, d'étudier et de participer à des activités politiques.

Le machisme soutient le capitalisme

La lutte des femmes pour l'égalité des droits a contraint le capitalisme à réintégrer les femmes dans la production sociale. La possibilité pour les femmes de se libérer de l'espace domestique a été une grande conquête. Mais, comme c'est le cas pour toute conquête dans le capitalisme, celui-ci a récupéré cet acquis pour faciliter l'exploitation et les profits. Et les idéologies qui étaient utilisées autrefois pour maintenir la « femme au foyer », sont utilisées maintenant pour justifier des journées de travail excessives et des salaires plus bas.
   En même temps, le capitalisme s'est approprié le rôle que les femmes remplissaient auparavant, de faire le ménage, et il l'a institutionnalisé. Ainsi, la femme a toujours l'obligation de prendre soin des tâches ménagères, en plus de travailleur hors du foyer. Cela les amène à avoir une journée double ou triple. Et c'est le capitalisme qui en profite.
   Ce mécanisme est très favorable pour les patrons car, alors que les femmes s'occupent des enfants et assument cette responsabilité, l'Etat et les patrons s'en dégagent et font des économies. Pas besoin de construire des cantines, des crèches et des buanderies publiques.
   Les patrons transfèrent aux travailleurs – dans ce cas, en particulier, aux travailleuses – une responsabilité qui devrait être de l'Etat. Les femmes travaillent gratuitement, non pour le mari, mais pour le système.
   Quand l'homme travailleur traite sa femme, travailleuse elle aussi, comme une employée, qui a l'obligation de prendre soin, à elle seule, des tâches ménagères, il reproduit cette idéologie du patron, au service du maintien du profit de ce dernier. S'il fait cela d'une façon grossière, en utilisant la violence physique ou psychologique, c'est encore pire. Il reproduit la puissance de l'idéologie avec l'usage de la force, en précisant que les femmes doivent obéir et doivent se résigner face à l'agression. Ce mensonge du capitalisme est donc un faux privilège pour les hommes, parce que les grands privilégiés sont les patrons.
   Il est vrai que les hommes peuvent bénéficier, dans l'immédiat, de cette condition. Toutefois, s'ils sont socialistes et veulent renverser le système, ils doivent aussi faire face à l'emprise du capital à l'intérieur du foyer, car ce n'est pas une relation entre deux personnes qui se reproduit, mais les intérêts du capitalisme.

Il faut combattre le machisme

Pour que la lutte contre les patrons et les gouvernements réussisse, elle ne peut pas se faire avec seulement la moitié des travailleurs. Aujourd'hui, les femmes sont déjà la moitié de la classe ouvrière, et au Brésil, elles sont la majorité. Nous ne pourrons jamais unifier tous les travailleurs si nous disqualifions les femmes, si nous ne prêtons pas attention à leurs exigences particulières, si nous ne tenons pas compte de leurs revendications, si nous ne les gagnons pas pour le combat.
   L'idée que cette discussion « divise la classe » ou qu'elle doit être faite « après la révolution » est fausse et ne sert qu'à maintenir le capitalisme. Ce qui divise la classe, c'est le machisme, parce qu'il disqualifie les femmes, met les hommes contre les femmes et les femmes contre les femmes elles-mêmes.

Le dépassement du machisme est le dépassement de la société de classes

Marx, Lénine et Trotsky ont placé la lutte pour les revendications des femmes comme l'une des principales tâches des travailleurs, depuis le Manifeste communiste. Il en est toujours ainsi aujourd'hui.
   Il faut livrer un combat permanent contre le machisme, au sein des partis politiques et des entités de lutte du mouvement, et dans notre vie quotidienne, afin que nous puissions être victorieux.
   Mais nous ne devons pas avoir l'illusion que nous pouvons en finir avec le machisme dans le capitalisme. Dans cette lutte, nous avons deux tâches : d'une part, combattre le machisme, le corriger et chercher à l'éviter de toutes nos forces ; d'autre part, nous organiser, hommes et femmes, pour vaincre la société de classes, et avec elle, le machisme.
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* Du Secrétariat national de la femme, du PSTU (B)