01 mars 2016
Secrétariat International de la LIT-QI
Avancer dans les luttes contre le machisme et l’exploitation
En Argentine, en juin 2015, plus d'un demi-million de personnes se sont mobilisées contre la violence envers les femmes, comme le firent aussi cent mille personnes en Espagne en novembre dernier. En Espagne également, plus de cinquante mille signatures ont été récoltées contre une manifestation convoquée en février dernier par les « ultramachistes » à Barcelone et Grenade, et qui fut effectivement interdite. Les milices de femmes kurdes, avec les milices de leurs camarades masculins, continuent à lutter contre l'armée réactionnaire de Daesh (EI).
Les travailleuses de l'éducation ont été les protagonistes d'innombrables grèves dans divers pays, au Brésil, en Colombie, en Italie. Les travailleurs et les travailleuses de l'Etat ont réalisé récemment d'importantes mobilisations contre la politique antiouvrière de Macri en Argentine. Deux grèves générales ont été menées en Grèce depuis le début de l'année contre les plans d'austérité du gouvernement Tsipras, dans lesquelles les secteurs des services publics, qui comptent avec un grand pourcentage de femmes, furent décisifs. A Athènes, les femmes organisent aussi des Maisons de femmes pour promouvoir la solidarité entre elles face au chômage et à la faim. Les professeurs palestiniens développent une importante grève, qui compte avec une forte composition féminine et se mène en marge des syndicats officiels, ce qui la rend encore plus significative. Cette lutte fait partie de la lutte historique et courageuse du peuple palestinien contre le gouvernement sioniste d'Israël qui leur a arraché leur territoire et leur liberté, et dans laquelle les femmes ont fait preuve d'un immense courage.
L'exploitation et l'oppression augmentent, comme produit de la profonde crise du système capitaliste : un système qui approfondit de plus en plus les inégalités sociales, avec à un extrême, une infime minorité de puissants riches, et à l'autre, des millions de pauvres de plus en plus exploités économiquement et opprimés politiquement, socialement et culturellement ; un système prédateur de la nature qui crée des déséquilibres environnementaux si importants qu'ils pourraient être irréversibles à court terme ; un système qui, de crise en crise, nous refuse jusqu'au plus élémentaire droit au travail. Seulement dans les pays développés, il y a 44 millions de chômeurs, sans parler de la situation dans les pays semi-coloniaux.
Les gouvernements dirigés par des femmes qui défendent des plans impérialistes ne nous représentent pas. Nous sommes aux côtés des hommes et des femmes de la classe des travailleurs, contre le machisme et l'exploitation, pour transformer le monde et lutter pour l'égalité et la liberté effectives pour les femmes travailleuses.
Les femmes travailleuses : les plus exploitées...
Le rapport de l'OIT sur l'emploi en 2015 confirme ce que nous avons dit : « Seul un quart des travailleurs dans le monde ont une relation de travail stable. [...] Dans les pays où l'on dispose de chiffres (et qui comprennent 84 pour cent de la population active mondiale), trois quarts des travailleurs sont donc employés avec des contrats temporaires ou à court terme, dans des emplois informels, souvent sans aucun contrat, comme indépendants ou dans des entreprises familiales sans rémunération. » Le rapport continue en montrant comment ce type de contrats affecte surtout les femmes : « Une autre tendance actuelle est l'augmentation du travail à temps partiel, surtout parmi les femmes jeunes. Dans la majorité des pays avec des informations disponibles, entre 2009 et 2013, les emplois à temps partiel ont augmenté plus rapidement que les emplois à temps plein. »
Il s'agit effectivement d'une croissance, non d'une nouveauté. Dans les années 1990, caractérisées par le grand boom du néolibéralisme, les capitalistes trouvèrent dans la restructuration des contrats de travail une énorme source de bénéfices. Dans des milliers d'usines des pays semi-coloniaux, la part de travailleurs fixes fut peu à peu modifiée, au point d'inverser le pourcentage par le biais de la sous-traitance : un minimum d'emplois fixes et une armée de travailleurs temporaires auxquels il était plus facile d'imposer des salaires de misère, sans primes ni stabilité, comme un chantage permanent pour éviter leur organisation et leur lutte. Les femmes furent la cible privilégiée de ce type de contrats. Selon le rapport de l'OIT, en 2014, près de 73 % du déficit mondial des emplois était dû à une diminution de l'emploi parmi les femmes, qui ne représentent que près de 40 % de la force de travail mondiale. Ces chiffres donnent froid dans le dos, une réalité qui touche drastiquement les femmes si nous prenons en compte qu'aujourd'hui dans le monde, le nombre de mères-chefs de famille a crû de manière alarmante ; des mères dont dépendent exclusivement les tâches ménagères et qui doivent supporter, non pas une ou deux journées, mais souvent, en plus de la journée de travail domestique, un travail en deux ou trois endroits différents, sous des contrats à temps partiel ou à l'heure. Elles doivent supporter la maltraitance des patrons, le harcèlement psychologique ou sexuel, le refus d'absences pour des raisons familiales et une kyrielle de souffrances infâmes. Dans le secteur des services, où la main-d'œuvre féminine est de 70 % ou plus, cela se manifeste aussi dans les bas salaires, les coupes dans les droits et la légalisation de l'instabilité par le biais des évaluations permanentes pour pouvoir garder l'emploi, comme c'est le cas dans l'enseignement.
... et les plus opprimées et les plus vulnérables
Depuis la fin de l'année passée, la presse relaie la croissante épidémie du virus Zika dans plusieurs pays d'Amérique Latine, provoquée par la piqûre du moustique Aedes Aegypti. Les organismes de la santé ont montré que chez les femmes enceintes, il pouvait engendrer la microcéphalie du fœtus. Les gouvernements ont sonné l'alarme, mais au-delà de campagnes rudimentaires de prévention ou d'un appel pour que les femmes ne tombent pas enceintes, ils sont incapables de prendre les mesures nécessaires. Comme toujours, les secteurs le plus pauvres de la population sont les plus affectés par les très mauvaises conditions de salubrité dans lesquelles ils doivent vivre et par les lamentables restrictions dans les services de santé.
Il est urgent de mener une campagne mondiale pour le droit complet à l'avortement légal des femmes qui préfèrent interrompre leur grossesse, face à cet énorme risque.
L'hypocrisie de la bourgeoisie ne peut pas être plus claire : alors qu'elle fait étalage de son « indignation » dans les journaux et à la télévision et répète qu'elle est « préoccupée », elle n'hésite pas à maintenir des législations restrictives sur le droit à l'avortement, ou des contraintes de toutes sortes dans les pays où la loi prévoit ce droit en cas de danger pour la santé de la mère ou de malformation du fœtus. Les plans pour améliorer l'accès à la contraception brillent, eux aussi, par leur absence. Le Pape François a déjà donné son verdict : dans ce cas, l'Eglise permet l'utilisation de contraceptifs, mais jamais le droit à l'avortement, qu'elle considère comme un crime. Elle ne voit toutefois aucun crime dans la condamnation de la femme et ses enfants à une vie de souffrances.
Les femmes migrantes : victimes du machisme et du racisme
Mais ce n'est pas seulement ce fait qui montre l'oppression de la femme et le machisme omniprésents dans la société. Selon une enquête réalisée par Amnesty Internationale, parmi les milliers de migrants et de réfugiés d'Afrique et du Moyen-Orient qui arrivent aux portes de l'Europe dans la crise migratoire la plus importante depuis la Seconde Guerre mondiale, la majorité des femmes interrogées ont affirmé avoir été victimes d'un type d'expression de violence machiste. L'organisation citée affirme que « les femmes et les filles réfugiées subissent la violence, des agressions, l'exploitation et le harcèlement sexuel à toutes les étapes de leur voyage, depuis la Syrie et l'Irak jusqu'en Europe, y compris sur le territoire européen ». Toutes les femmes interrogées ont dit à Amnesty s'être senties menacées et en insécurité durant leur voyage ; et elles dénonçaient que les trafiquants, le personnel de sécurité ou d'autres réfugiés les avaient soumises à la maltraitance physique et l'exploitation économique, les avaient pelotées ou les avaient mises sous pression pour avoir des relations sexuelles avec elles, dans presque tous les pays par où elles étaient passées. Tirana Hassan, directrice du Programme de Réponse à la Crise chez Amnesty International, signale que « les femmes et les filles qui voyagent seules et celles qui le font, accompagnées seulement de leurs enfants, s'étaient senties particulièrement menacées dans les zones de transit et les campements en Hongrie, en Croatie et en Grèce ».
La situation déjà terrible de milliers des migrants qui s'en vont au risque de leur propre vie et de celle de leur famille, poussés par l'absence d'emploi, la pauvreté, la violence extrême dans les pays africains et la guerre en Syrie, s'est encore aggravée par les actes racistes des gouvernements et de l'appareil répressif des pays de destination. Les organisations des droits humains qui travaillent dans la région ont rapporté comment les femmes et les mineurs des deux sexes sont soumis à un chantage par les mafias du trafic de réfugiés qui les vendent comme esclaves sexuels. Nous ne pouvons pas oublier à quel point les femmes sont utilisées comme un trophée de guerre dans les conflits armés, et violées pour humilier l'ennemi.
Comme si cela ne suffisait pas, nous devons également affronter de manière décidée des groupes d'hommes qui commencent à s'organiser, heureusement jusqu'à présent sous une forme très moléculaire. Il s'agit des dénommés « ultra-machistes », qui se font appeler « le retour des rois » et qui font campagne pour la légalisation du viol en privé, contre le droit des femmes à travailler et contre l'égalité des sexes. Ils affirment en effet que nous ne sommes pas égales, que les femmes sont plus brutes et ne devraient donc pas avoir de droits politiques. C'est le machisme poussé à l'extrême, qui, en Europe, va toujours de pair avec le racisme : ultra-machisme rime sans aucun doute avec fascisme. Il y a aussi les dénommés « post-machistes », qui se posent en victime des rares mesures que les Etats ont prises contre la violence envers les femmes.
Unité de la classe ouvrière pour faire face à la crise économique
En Amérique latine, la crise est déjà installée. Les pronostics du FMI pour 2016 et 2017, annoncés en février de cette année, sont assez sombres et ont été corrigés par rapport à ceux de l'année passée avec une tendance à la baisse. Dans les pays développés, tout indique qu'on pourrait se diriger vers une nouvelle récession.
Alors que les capitalistes font leurs comptes en nombres de dizaines de chiffres — nombres trop grands pour entrer dans la tête des travailleurs —, nous en sommes réduits à compter les pièces de monnaie et à utiliser la tirelire artisanale. Telle est la réalité : lorsque l'économie capitaliste se développe, il n'y a que des miettes qui tombent – ou même pas – pour la classe ouvrière et les exploités par le grand capital ; et quand s'annoncent la crise et la récession, on nous demande d'ajuster encore davantage la ceinture. Ce à quoi nous pouvons donc nous attendre, ce sont les recettes connues et mises en œuvre par les gouvernements néolibéraux dans le monde entier, en doses de plus en plus grandes. Le chômage, les bas salaires et les contrats de travail bidon ; les réformes fiscales qui permettent de réduire les impôts pour les capitalistes et augmentent les taxes à la consommation comme la TVA ; la diminution du seuil pour l'impôt sur le revenu ; les coupes budgétaires pour la santé et l'éducation et pour les services sociaux de maternité et de soins des enfants, des personnes âgées et des handicapés, qui se répercutent sur la double journée des femmes ; l'augmentation des tarifs pour les services publics et les transports ; l'élévation de l'âge et l'augmentation des cotisations pour la pension ; etc.
Notre réponse doit être l'unité de la classe ouvrière et des salariés pour répondre à ces plans par la lutte, la grève et la mobilisation. Il n'y a pas de solution dans le cadre du système capitaliste. Dans les luttes quotidiennes, nous forgerons une solution ouvrière pour une nouvelle société dans laquelle nous en finirons une fois pour toutes avec l'exploitation et avec tout type d'oppression. Une société socialiste.