21 novembre 2020
25 Novembre : Nos vies comptent ! Plan d’urgence face à la pandémie de violence !
Le 25 Novembre est depuis de nombreuses années une journée de lutte, de rage et de dénonciation de la violence sexiste que nous subissons chaque jour. L'ONU a officialisé cette date comme l'anniversaire du meurtre des sœurs Mirabal par Trujillo, le dictateur dominicain qu'elles combattaient.
Par la LIT-QI
Les chiffres de la violence augmentent d'année en année, mais loin d’être intimidées, nous descendons dans la rue avec chaque fois plus de force pour dénoncer cela et dire BASTA ! Nos vies comptent !
Cette année, la tendance s'est malheureusement considérablement accrue, car la réponse du capitalisme à la crise sanitaire de Covid a généré plus de souffrance et de violence à notre égard.
La situation dans le monde
Dans le monde entier, les femmes vivent dans l'insécurité. En pleine pandémie, les féminicides, les viols et la violence domestique ont explosé. Pendant le confinement du COVID-19, de nombreuses femmes sont piégées chez elles avec leurs agresseurs ou abuseurs, alors que moins de refuges et de services sont disponibles et que les amis et les réseaux de soutien sont plus difficiles à joindre.
La suspension nécessaire des cours en présentiel a isolé des milliers de filles et de garçons de l'école, les laissant sans aucune possibilité de signaler les abus ou les mauvais traitements au sein de la famille, qui ont augmenté avec le confinement obligatoire.
L'ONU elle-même reconnaît la gravité de la situation. Selon son dernier rapport, la violence contre les femmes continue d'être un problème grave dans le monde. « Pendant le confinement du COVID-19, de nombreuses femmes et filles sont isolées dans des environnements dangereux où elles courent un risque accru de violence conjugale. Environ un tiers des femmes dans le monde ont subi des violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur partenaire; et 18 % ont été victimes de ce type de violence au cours des 12 derniers mois. Dans les cas les plus extrêmes, la violence contre les femmes est mortelle : dans le monde, on estime que 137 femmes sont tuées chaque jour par leur partenaire ou un membre de leur famille. »
La moitié des femmes dans le monde ne peuvent pas décider de l'utilisation de contraceptifs ou refuser d'avoir des relations intimes. Sans parler de l'illégalité de l'avortement dans la plupart des pays, de son accès encore plus difficile en cette période de crise sanitaire là où il est autorisé, et des politiques publiques d'abandon de la maternité pour les femmes qui décident de devenir mères.
Loin d'être une conséquence de la situation actuelle, la violence à l'égard des femmes est l'expression de la décadence et de la barbarie du système capitaliste et de son incapacité à garantir l'égalité, les droits et la fin du machisme et de la violence à l'égard des femmes. La pandémie n'a fait qu'aggraver une situation déjà désespérée.
La bourgeoisie et ses gouvernements sont complices de la violence.
Les mesures prises par certains gouvernements furent totalement insuffisantes. Pire encore, ceux qui avaient une attitude négationniste face à la pandémie n'ont rien fait, et même de nombreux programmes de soutien et de services de base ont été interrompus, voire fermés, en raison du chaos du système de santé.
Les Nations Unies estiment que 45 millions de dollars seraient nécessaires pour lutter contre la violence sexiste dans le monde pendant la pandémie, mais à peine 0,3 % de ce budget y a été alloué.
C'est la section la plus sous-financée, mais les institutions internationales de la bourgeoisie et de l'impérialisme ne font pas de commentaire: la question n'a pas été mentionnée dans le programme de Surveillance des politiques du Fonds monétaire international (FMI), ni à la Banque mondiale, ni dans la Protection Sociale et la Réponse du travail au Covid-19 de l'Organisation internationale du travail.
L'aggravation de la crise économique, générée par les réponses que les gouvernements ont apportées à la pandémie, a frappé brutalement les travailleuses et a aggravé le tableau de la violence et des inégalités, en particulier pour les femmes noires et pauvres. Actuellement, un peu plus de la moitié de la population féminine mondiale est au chômage, et dans des endroits comme l'Asie du Sud, l'Afrique du Nord et l'Asie occidentale, moins d'un tiers des femmes ont un emploi.
La pandémie et la surcharge des tâches domestiques ont exclus les femmes du marché du travail, les reléguant à des emplois plus précaires et augmentant l'écart salarial entre les hommes et les femmes. Beaucoup travaillent dans les sous-secteurs les plus touchés par le Covid-19, où elles ont été impactées par les mesures de verrouillage, y compris dans les activités rémunérées dans le travail domestique, l'hébergement et les services de restauration, et le commerce de détail. Les femmes sont également en première ligne dans la lutte contre la pandémie, qui représente plus de 70 % des travailleurs du secteur de la santé et font face à des risques d'infection plus élevés que les hommes sur le lieu de travail.
Les femmes migrantes ont vu leur situation empirer de manière catastrophique: Exclues dans de nombreux cas du système de santé, ou de la misérable « aide » financière, et contraintes d'attraper le virus puisque beaucoup sont des travailleuses domestiques qui de manière précaire ont continué à se rendre dans des maisons des riches pour y travailler malgré les confinements obligatoires. La grande majorité a été réduite au chômage et a dû recourir à la prostitution.
Un chapitre à part pourrait être dédié aux femmes LGBTI, qui sont victimes de discrimination sur le marché du travail et jetées dans la prostitution, ce qui, dans ce contexte de pandémie, les a encore plus appauvries et exposées à des situations encore plus violentes que celles qu'elles subissaient déjà.
Les conséquences sociales et économiques de cette pandémie placent les femmes travailleuses et pauvres dans des conditions matérielles plus difficiles et avec moins de ressources pour sortir d'un environnement de violence sexiste ou faire face à toute agression, surtout si elles sont jeunes, immigrées, racialisées ou LGTBI.
La crise du Covid a montré que nous ne sommes pas tous égaux dans ce système. Les inégalités et l'oppression capitalistes ont été exposées plus brutalement. Les travailleurs, la population pauvre, les marginalisés et les opprimés comptent les morts. Nous en supportons le pire en souffrant de la faim, de la violence, du désespoir et de tout pour que les capitalistes garantissent leurs profits. Les femmes, les noirs, les immigrés, les autochtones, les LGBTI et tous les opprimés en souffrent davantage. Des journées de travail pénibles nous sont imposées, des expositions évitables au virus, des morts dans la rue par manque d'accès à la santé, s'ajoutent à la violence sexiste, xénophobe, raciste et lgbtphobe de ce système qui nous divise et nous opprime pour nous exploiter de plus en plus.
Le mensonge de « l’empowerment »
Alors que la violence augmente et que nous, les femmes, nous descendons dans la rue en masse pour nous battre, le discours que les institutions construisent est que la solution pour nous est le triomphe individuel et la montée des femmes aux postes de pouvoir. Malheureusement, de nombreuses organisations qui se disent féministes, et dont certaines sont même descendues dans la rue avec beaucoup d'entre nous, soutiennent et transmettent ce discours.
La présence de femmes à la direction des gouvernements, des ministères, des parlements ou des conseils d'administration des entreprises est un exemple de la façon dont la lutte dans la rue met à mal certains préjugés, mais elle ne fournit aucune solution fondamentale à notre oppression.
Kamala Harris, loin d'être un triomphe pour les femmes, comme veulent la présenter les progressistes, en étant la première vice-présidente aux Etats-Unis, est une référence politique des capitalistes, qui n'hésiteront pas à étrangler encore davantage de travailleuses et les travailleurs et les noirs au service des grandes entreprises.
Les décisions de fermer les programmes d'aide à la violence ou de donner la priorité aux budgets « d'aide » aux hommes d'affaires, plutôt qu'à l'urgence du covid et de la violence, ont été prises à la fois par les gouvernements de droite et par ceux qui se présentent comme progressistes, voire féministes.
Même l'ONU reconnaît que son programme « vers l'égalité de pouvoir et l'égalité de droits pour les femmes » stagne. Il n'y a que 20 femmes chefs d'État, et bien que le nombre de sièges féminins ait augmenté, ils n'ont même pas dépassé 25 %. De même dans le secteur des affaires, où les femmes atteignent à peine 18 % dans les conseils d'administration. Ce discours échoue même pour les femmes qui jouissent des privilèges de la classe exploiteuse.
Unité de la classe pour lutter contre l’oppression et l’exploitation
Nous vivons des temps terribles. La pandémie de Covid, l'aggravation de la crise économique et la violence sexiste nous frappent jour après jour. Les gouvernements de la bourgeoisie, qu'ils soient de droite ou « progressistes », composés d'hommes ou de femmes bourgeoises, montrent leur totale incapacité à nous donner une réponse, parce qu'ils se soucient seulement du maintien du profit des capitalistes, au prix de millions de vies.
C'est nous qui portons le fardeau, nous qui cumulons les tâches, nous qui nous occupons des enfants, des personnes âgées, des malades, nous qui nous isolons avec nos agresseurs, alors qu'ils ont continué à nous violer, à nous tuer ou à nous battre à cause de notre identité de genre. Nous disons Basta !, nous sortons dans la rue et nous continuons à nous battre. Nous sortons avec les femmes afro-américaines aux États-Unis, nous sortons avec le peuple chilien qui continue à vouloir tout changer, nous sortons avec les masses au Pérou et en Colombie, nous sortons en masse avec les Polonaises qui veulent l'avortement légal, avec les gens au Belarus qui disent basta à la dictature.
Nous sortons et nous devons continuer à sortir avec notre classe, avec les millions de travailleurs qui ne supportent plus le poids que les riches veulent leur faire porter. Nous ne faisons pas confiance aux visages féminins qu'ils mettent dans les gouvernements, ni aux pièges électoraux qui ne favorisent que les puissants. Nous avons confiance en notre force, en sachant que pour mettre fin à la violence et à l'oppression sexistes, nous devons lutter contre ce système qui nous exploite et nous opprime.
Mais dans la lutte contre le machisme et l'oppression, nous voulons le soutien des hommes travailleurs et nous en avons besoin, car le machisme qui opprime, humilie et surexploite les femmes sert à la fois à diviser et à affaiblir la classe, et à accroître l'exploitation de tous les travailleurs. En ce sens, nous sommes contre toutes les visions sexistes qui s'opposent à la bataille pour que les hommes rompent avec leur propre machisme et viennent se battre avec nous.
Le combat pour nos droits doit être celui de toute la classe ouvrière, pour que nos camarades hommes arrêtent également de reproduire le machisme, et pour que nos organisations combattent ce fléau parmi nous afin que nous ayons une place dans la lutte commune. Ce combat ne se fait pas chacun dans son coin, séparément. Il s'agit de combattre ensemble le machisme au sein de notre classe. Il n'y a pas moyen de mettre fin à l'oppression sans renverser ce système capitaliste qui nous opprime et nous détruit.
Pour avoir un plan d'urgence contre les violences sexistes, il faut lutter contre les plans d'ajustement et les gouvernements qui l'utilisent. Ce 25 novembre, nous descendrons dans la rue, nous prendrons des mesures de prudence, mais nous n'arrêterons pas de réclamer le droit de vivre.